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31 décembre 2020 4 31 /12 /décembre /2020 02:46
     
 

« La jeunesse, sur qui on fait souvent reposer un renouveau indéfini et l’avenir de la planète, prend cher », écrit notre chroniqueuse Corinne Morel Darleux. Contre cela, nous avons besoin de « renforts imaginaires, d’anges gardiens, de véhicules pour l’évasion, ouvrant la possibilité d’envisager le monde autrement qu’en termes de domination ».

Corinne Morel Darleux est conseillère régionale en Auvergne — Rhône-Alpes et a publié Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce (Libertalia).

Corinne Morel Darleux.

Ne pas laisser la jeunesse s’étioler… Je suis, comme beaucoup, particulièrement inquiète du sort des jeunes dans cette période de pandémie, de couvre-feu imposé, mais aussi d’incertitudes sur l’avenir de nos écosystèmes et d’imaginaires futuristes, hélas toujours gonflés à la testostérone, nourris de drones, d’écrans et de technologie.

Des étudiants de la Cité internationale isolés de leurs familles, de leurs amis, dans un pays qui ne leur est pas familier et qui se retrouvent à l’aide alimentaire après avoir perdu leur petit boulot. Des adolescents, qui ont eu dix-huit ans cette année et n’ont pas pu fêter ce rituel d’entrée dans l’âge adulte. De jeunes travailleur-ses qui débarquent sur le marché de l’emploi au moment où les plans de licenciement se multiplient comme jamais.

Des gamins enfermés dans leur chambre, qui ne voient plus leurs amis, leurs professeurs, leur famille qu’à travers un écran. Des enfants, désignés comme des bombes à retardement, porteurs potentiels d’un virus invisible qui peut tuer leurs aînés. Des lycéens ciblés, matraqués et réprimés quand ils osent manifester. Des jeunes qui ne savent plus de quoi demain sera fait, qui pour certains décrochent à la fac et, parfois, basculent dans la dépression et les troubles mentaux.

Toute une génération privée d’exutoire et de divertissement. Sans cinéma, sans boite de nuit, sans bars ni soirées. Juste des attestations et un couvre-feu pour contraindre et discipliner. Le tout, dans une ambiance de fin du monde permanente, avec trente-et-une nouvelles espèces éteintes à l’état sauvage, un nouveau record de température pour l’année 2020 et un gouvernement qui s’en fout. Cette jeunesse, sur qui on fait souvent reposer un renouveau indéfini et l’avenir de la planète, cette jeunesse prend cher.

Une vingtaine de jeunes invités à réfléchir sur la manière dont la fiction peut « armer nos imaginaires »

C’est dans ce contexte que je me suis rendue à Brive-la-Gaillarde (Corrèze) cette semaine — oui, dans le respect des gestes barrières, masque, gel, prudence et distance, tout ça, au moins autant que dans le métro, les centres commerciaux, à l’usine ou à l’église. J’y accompagnais la non-réouverture, le 15 décembre, du théâtre de L’Empreinte avec une conversation autour de mon livre Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce (Libertalia, 2019) en visio.

Le lendemain, j’étais attendue au lycée d’Arsonval, avec l’artiste associée du théâtre, Barbara Métais-Chastanier, et l’enseignant Denis Dufour, pour un atelier avec des étudiants en classe préparatoire d’arts plastiques. Une vingtaine de jeunes y avaient été invités à réfléchir sur la manière dont la fiction peut « armer nos imaginaires ».

Chacun-e avait apporté un objet, un film, un texte qui l’avait marqué. Des groupes se sont formés et chacun, sur scène, a produit du collectif à partir de ces témoignages de fiction avec une consigne : travailler en archipel, reliés. Le résultat fut ébouriffant.

Les photos parlent d’elles-mêmes, les jeunes sont pleins d’imagination et d’enthousiasme. Ce sont des projets qui nous tiennent à cœur, les seuls qui nous restent pour l’heure, les seuls qui nous permettent de garder le lien. Et par chance, il est adressé aux futurs citoyens. Peut-être sauront-ils rendre la culture essentielle… »

D’abord dans la réalisation, incroyablement sensible et imaginative, graphique souvent, très poétique. Ensuite, dans le paysage saisissant que dessinaient tous ces corps vivants, vibrants d’émotion et de retenue alternativement, sans cesse en mouvement, montant sur une échelle pour installer un réveil, scotchant le sol d’annotations, couvrant les murs d’inscriptions à la craie, illuminant leurs tableaux d’objets, jouant de la guitare, griffonnant dans des carnets, s’allongeant au sol pour mieux juger d’un effet… Une énergie et une sensibilité formidables se sont déployées dans cet espace. Un condensé devenu rare d’échanges, d’idées et d’élans.

Des ateliers à Brive-la-Gaillarde (Corrèze).

On était très loin de l’imaginaire futuriste du ministère des Armées, dévoilé à la mi-janvier, fait de soldats augmentés, de technologies sophistiquées et d’apocalypse guerrière [1]. Ce que ces étudiants ont apporté, c’est un raton laveur et une perruche en peluche, des feuilles mortes, un film d’animation japonais dédié à la destruction de la planète [2] et l’univers des Pompoko combattants et fanfarons d’Isao Takahata.

Il est essentiel de nourrir cet imaginaire, de ne pas laisser le présent se cadenasser

Ce qu’ils ont exprimé, c’est avant tout une nostalgie enfantine, celle de la douceur d’un foyer et, déjà, le sentiment poignant d’une perte d’insouciance. Mais aussi la nécessité de mêler le réel et l’imaginaire, la nature et la lecture, d’associer l’amour et l’espoir aux débats et à l’entraide, par le biais d’une recette de l’imaginaire composée de chips de rêve et assaisonnée d’une pincée de contestation.

On y a lu encore le besoin de renforts imaginaires, d’anges gardiens pouvant revêtir différentes formes, vieille femme, petite fille ou dragon, qui les accompagneraient, non pour se battre à leur place mais pour « chuchoter depuis les feux de la rampe, pour nous rappeler que c’est nous qui détenons le pouvoir dans les mondes que nous créons » [3]

Il est essentiel de nourrir cet imaginaire, de ne pas laisser le présent se cadenasser. D’alimenter, par petites touches, chacun-e à sa manière, d’autres horizons, réels ou fictifs. De ne pas abdiquer le droit au beau, au sensible, aux corps en mouvement et à la pensée émancipée.

Cela passe par l’accès au monde du dehors, au contact avec les éléments, à des cours de danse sous la pluie, du théâtre chanté, à des courses effrénées dans un champ d’été, et, aussi, à des lectures blotties sous une couette quand l’extérieur est trop gris.

Il existe des livres jeunesse qui racontent une autre histoire que celle qu’on nous a préparée, qui font dévier des trajectoires toutes tracées. Des romans qui font apparaître une autre réalité, où les êtres humains et les animaux tissent un récit commun, fait de métamorphoses et nouvelles manières d’habiter un lieu, de l’explorer, d’en tirer sa subsistance autrement qu’à coups de pollutions et de supermarchés.

Des livres qui sont autant de voyages, de véhicules pour l’évasion, ouvrant la possibilité d’envisager le monde autrement qu’en termes de domination. Le très beau Sirius (Rouergue, 2017) de Stéphane Servant, le marquant Comme des Sauvages (Pocket Jeunesse, 2020) de Vincent Villeminot, l’inattendu Après nous les animaux (Casterman, 2020) de Camille Brunel, le sensible Le royaume de Kensuke (Gallimard, 2007) de Michael Morpurgo...

Ces quatre romans que je retiens pour 2020, parmi tant d’autres certainement, ne sont pas des contes de fées. On y retrouve à des degrés divers la violence des rapports et des manifestations de l’hostilité inhérente au vivant, mais ce sont des fictions qui autorisent à penser différemment. Des histoires qui accompagneront parfois toute une vie, des paysages qui s’ancrent sous la peau et des personnages qui deviendront peut-être, pour certains, ces fameux anges gardiens dont on a, petits et grands, tant besoin.

 

 
     
 

 


[1Comme on le lit sur le site de la Red Team, le nom de l’équipe missionnée par le gouvernement, sa mission est « d’imaginer les menaces pouvant directement mettre en danger la France et ses intérêts. Elle doit notamment permettre d’anticiper les aspects technologiques, économiques, sociétaux et environnementaux de l’avenir qui pourraient engendrer des potentielles de conflictualités à horizon 2030-2060 ».

[2Origin, spirits of the past, de Keiichi Sugiyama

[3Citation apportée par un étudiant, issue du film fantastique américain, réalisé par Zack Snyder, Sucker Punch.

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18 décembre 2020 5 18 /12 /décembre /2020 10:23

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15 décembre 2020 2 15 /12 /décembre /2020 05:45

Le groupe Carrefour France vient de mettre 90.000 de ses 110.000 salariés au chômage partiel, payés sur fonds publics, alors qu’il a versé 183 millions d’euros de dividendes à ses actionnaires. Un scandale dénoncé par plusieurs organisations syndicales et politiques.

« C’est un véritable scandale », s’agace Philippe Allard, délégué CGT Carrefour. Sans aucune concertation, la direction du groupe Carrefour vient de décider de placer la quasi-totalité de ses salariés en France, 90.000 sur 110.000, sous le régime du chômage partiel. Concrètement, les salariés qui travaillent dans les rayons fermés par le gouvernement (culture, électroménager, jouets, textile...) ne travailleront pas deux à trois jours par semaine, et ceux qui travaillent dans les autres linéaires, ainsi que les caissières et vigiles, resteront chez eux un jour par semaine.

Si Carrefour s’est engagé à compenser le manque à gagner de ses salariés, plusieurs syndicats dénoncent un effet d’aubaine visant à réaliser des économies substantielles sur le dos des contribuables, tout en faisant pression sur le gouvernement pour la réouverture des rayons non alimentaires de la grande distribution. Pour Olivier Guivarch, syndicaliste CFDT cité par France Info, il est « prématuré de faire appel à l’argent public pour baisser le coût du travail ».
Effet d’aubaine sur le dos des contribuables

Certes, Carrefour n’est pas la seule enseigne à recourir au chômage partiel – Casino, Monoprix ou Auchan en profitent aussi – mais elle semble être la seule à placer 80 % de ses salariés sous ce régime avantageux. Le groupe Carrefour fait partie de ces entreprises du CAC40 que l’Observatoire des multinationales a récemment épinglé comme « corona-profiteurs » : cette enseigne profite largement des aides publiques tout en continuant à verser de juteux dividendes à ses actionnaires, en l’occurrence 183 millions d’euros en 2020.

N’acceptant pas cet état de fait, le sénateur communiste de Seine-Saint-Denis Fabien Gay demande au ministre de l’Économie Bruno Le Maire « combien de temps cela va-t-il durer ? ». La ministre du Travail, Elisabeth Borne, s’est pour l’instant contentée de répondre que le gouvernement « vérifierait » que toutes les demandes de chômage partiel sont bien « justifiées ». Sans conditionner pour autant le chômage partiel au non-versement de dividendes. Les corona-profiteurs vont pouvoir profiter encore longtemps.

Par Maxime Combes, le 27 novembre 2020
Du site Bastamag

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10 décembre 2020 4 10 /12 /décembre /2020 03:23

Il aura fallu attendre plus de 2 semaines de lutte des salariés de l’établissement de Villeurbanne en grève totale, les nombreuses démarches auprès des élus locaux, des députés de l’assemblée nationale, et aussi du ministère de l’économie pour que notre direction concède de revenir discuter des propositions alternatives de l’intersyndicale.

M. Eric Chaussin, nouvellement responsable des activités HVS, et décideur de l’avenir des salariés de Villeurbanne a enfin pris le temps de les rencontrer ce lundi 7 décembre à Lyon en aparté de la réunion avec les représentants de l’Intersyndicale.… Si les débats ont été positifs, avec des avancées, le bilan global sur les suppressions reste très négatif avec encore potentiellement 171 suppressions d’emplois.

Seulement 72 postes seraient sauvés, dont l’ensemble des postes GCB. La direction a donc revu sa copie et ce qui était impossible hier semble devenir possible aujourd’hui. Elle a donc décidé qu’il y avait un avenir pour nos disjoncteurs de générateurs à Villeurbanne ! Mieux encore, elle souhaite développer une activité commerciale dédiée, engager une campagne de redesign de la gamme et relancer le projet FKG1 Néo qui était suspendu, avec dès 2021 une campagne d’essais Également, elle souhaite relancer les investigations sur la moyenne tension avec les ampoules à vide, proposition que nous avions faite l’année dernière…

En termes d’emplois, cela va se traduire par le maintien de 84 emplois pour l’activité GCB à Villeurbanne.

Nous avons insisté sur le fait qu’il y a actuellement de nombreux intérimaires et prestataires qui doivent se traduire par des créations de postes, limitant les dégâts dans le cadre du PSE. La direction a confirmé que CEME en Italie serait l’usine qui produirait les disjoncteurs LT en Europe.

Tout ses indicateurs de performances en 2019 sont meilleurs que ceux de Villeurbanne ! Comparaison facile, quand on sait que Villeurbanne est engagé dans des projets de restructuration et de suppressions d’emploi depuis plus de 18 mois…

Difficile aussi de comparer des usines qui ne produisent pas les mêmes produits avec les mêmes exigences technologiques et contractuelles… Une concession qui n’est pas encore confirmée, serait le maintien de 2 postes en ingénierie client et 2 postes de chargés d’affaires pour maintenir des compétences à Villeurbanne pour les disjoncteurs LT. Concernant ARC, la direction souhaite également conserver une activité prototypage pour les disjoncteurs LT spéciaux de type GL HVDC, GL314BPS et GL g3 qui permettrait de maintenir 5 postes de production supplémentaires.

Ceci reste aussi à confirmer. Les décisions sur ces options seront annoncées le 15 Décembre lors de la réunion du CSEC

Après plus de 2 semaines de gréve totale Et l’intervention du ministère de l’économie suite à notre RdV à Bercy ? 

La direction est revenue discuter des propositions intersyndicales Alternatives industrielles Villeurbanne  Coordination des Syndicats CGT  GRID Solutions

Contact : Délégué Syndical Central : serge.paolozzi@ge.com  Villeurbanne : nadir.bennat@ge.com  Aix les Bains : anthony.gros@ge.com Saint Priest : michel.le‐brusq@ge.com  Massy : yves.leveque@ge.com Villeurbanne le 8 Décembre 2020  Les discussions pour service ont été stériles, la direction campant sur ses positions En argumentant que la rentabilité était sa seule préoccupation ! Pourtant, Service est une activité profitable aujourd’hui.

Nos propositions de relocalisation à Villeurbanne permettaient d’accroitre les résultats de l’unité service de Saint Priest tout en préservant les compétences et l’emploi. La direction de service à fait le choix de la rentabilité maximum au détriment des salariés sans écouter nos arguments, et négligeant les difficultés et incohérence de la mise en œuvre du transfert à Aix : nous le déplorons !

Deux petites concessions ont été faites par la direction de Service : - Revoir le nombre de suppressions de postes pour les superviseurs de Chantier - Négocier des conditions particulières de télétravail pour les postes transférer à Aix les bains et offrir la possibilité de bureaux partagés sur le site de Villeurbanne.

Avec une fréquence de déplacement sur Aix à définir en fonction des métiers et des impératifs de service (difficulté possible pour les chargés d’affaires) Face à la décision de la direction de ne pas maintenir une activité LT à Villeurbanne, nous avons proposé d’utiliser le magasin actuel pour créer un magasin Service France sur le site de Villeurbanne Plusieurs avantages à cette solution : ‐ S’exonérer d’utiliser un sous-traitant comme DHL dont les coûts sont élevés ‐ Utiliser le magasin LT de AHT actuel qui sera vide dans quelques mois ‐ Utiliser les surfaces au sol disponibles de l’établissement ‐ Réduire les frais fixes de Villeurbanne, puisque qu’il y aurait une refacturation à Service des capacités utilisées ‐ Utiliser la navette actuelle entre AASI et Aix pour expédier les pièces à Aix et donc éviter qu’elle ne parte à vide (pas de frais supplémentaire !) ‐ Surtout sauver des emplois sur le site de Villeurbanne avec cette activité magasin Service France Mme BENEDETTO, s’est montré intéressée par cette proposition et s’est engagée à l’étudier et revenir vers nous en fin de semaine.

Nous avons également rappelé à M. Eric Chaussin que le contenu social du PSE était bien en dessous de ce qui avait été négocié il y a seulement quelques mois. Nous avons insisté pour qu’il intervienne et que le livre 1 soit revu en conséquence pour démarrer la négociation du mercredi 9 décembre.

Il est indispensable que la direction intègre dans le livre 1 ce qui a été négocié précédemment, pour : o Les mesures d’âge o La prime de volontariat o La prime de licenciement o Le congé de reclassement o La création d’entreprise o La prime mobilité Des propositions alternatives doivent encore être prise compte La partie sociale doit être revue à la hausse Des mesures d’âges doivent éviter des licenciements Restons tous mobilisés !

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19 décembre 2018 3 19 /12 /décembre /2018 00:20

Après près d’un mois de mobilisation des gilets jaunes, Emmanuel Macron s’est enfin décidé à parler. C’était lundi soir, devant plus de 20 millions de français qui attendaient ce que le chef de l’Etat avait à annoncer. Et comme moi ils ne furent pas satisfaits.

Car Emmanuel Macron n’a pas répondu aux attentes, non seulement des gilets jaunes, mais plus généralement des Français qui les soutiennent. Des mesurettes ont été annoncées et il a bafouillé quelques excuses, certes, mais ces propos apparaissent tellement décalés de la réalité de la situation. D’ailleurs les Français ne s’y trompent pas puisqu’au lendemain de sa prise de parole, 54% d’entres eux déclaraient vouloir la poursuite du mouvement des gilets jaunes.

Les mesures

Quatre mesures ont donc été annoncées :

la suppression de la hausse de la CSG pour les retraités touchant moins de 2 000€ par mois, dès le mois de janvier, pour l’année 2019. Une prétendue augmentation du SMIC de 100€.

Le retour des heures supplémentaires défiscalisées.

Une prime de fin d’année dans les entreprises.

D’aucuns pourrait penser que certaines revendications des gilets jaunes ont été entendues et que les plus démunis vont bénéficier de ces mesures. Or, à bien y regarder, on peut se rendre compte, très rapidement, de la supercherie.

Regardons la suppression de la hausse de la CSG pour les retraités d’abord. Une mesure qui n’aurait jamais dû être votée par ce gouvernement, mais surtout une annonce qui ne peut satisfaire tout le monde. Que se passera-t-il si un retraité (ou un couple de retraités) gagne 2 001€ ? Et surtout que se passera-t-il en 2020, puisque cette annulation ne vaut que pour l’année 2019 ?

Quand au retour des heures supplémentaires défiscalisés, une mesure qui était en place sous Sarkozy, elle peut conduire les employeurs à recourir aux heures supplémentaires plutôt que d’embaucher des travailleurs supplémentaires.

Mais sa plus grosse entourloupe vient sans doute de sa prétendue augmentation du SMIC qui n’en est pas une. Car, si Emmanuel Macron a bel et bien annoncé l’augmentation de 100€ par mois du SMIC, cela se fera de trois manières différentes. Premièrement il sera revalorisé à hauteur de 1,8%, soit une vingtaine d’euros. Deuxièmement une autre vingtaine d’euros découlera d’une baisse des charges sociales. Il reste donc 60€ à trouver.

Cela se fera au moyen d’un coup de pouce à la prime d’activité, qui devait initialement être répartie sur les années du quinquennat en plusieurs tranches. En clair Emmanuel Macron ne fait donc que tenir une de ses promesses de campagne. Ce n’est donc pas le SMIC qui augmentent, puisque toutes les personnes payées au SMIC n’y auront pas le droit. Mais surtout le président de la République a bien insisté sur le fait que les employeurs n’auront pas à payer ce « coup de pouce ». Autrement dit c’est le peuple qui va encore devoir payer ce qui s’apparentait à première vue à un cadeau.

Et que dire, pour finir, de cette prime de fin d’année. Une prime qui sera versée au bon vouloir des patrons, donc qui, dans de nombreux, cas ne verra jamais le jour.

Certes il y a eu également des phrases contre l’évasion fiscale, ou sur le fait que les patrons français devaient payer leur impôts en France, admettant donc au passage que ce n’est pas le cas pour certains. Mais ces phrases restent vides de sens et ne s’accompagnent pas de mesure concrètes. Or c’était justement là, parmi ces grandes fortunes, ces privilégiés à qu’il fallait prendre l’argent.

Ceux qui s’engraissent sur le dos de la majorité des gens et qui ne contribuent en rien à la solidarité envers les plus démunis. Il aurait été très simple à Emmanuel Macron de rétablir l’ISF – ce qui aurait permis de récupérer près de 3,5 milliards d’euros – mais même cela le président des riches a été incapable de le concéder.

C’est tout le résumé de ces 13 minutes d’interventions. Où les riches, les actionnaires, les grands patrons, les banquiers auront, comme toujours, été épargnés alors que c’est à eux de payer désormais.

Dans le même temps, Emmanuel Macron n’a pas eu un seul mot pour les victimes de ces derniers jours, se contentant de dénoncer la violence, n’a pas eu un seul mot pour les lycéens et les étudiants qui se mobilisent pour leur avenir, ni pour les fonctionnaires, ni pour les chômeurs, ni pour les handicapés.

Bref, si ce discours marque effectivement un premier pas de recul, il ne constitue en rien une réponse convenable aux revendications à la fois des gilets jaunes mais plus globalement d’une large majorité de Français.

République sociale

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13 décembre 2018 4 13 /12 /décembre /2018 00:20

 

J’ai grandi à deux pas de l’arc de triomphe. Adolescents, nous arpentions, la nuit, ce quartier déjà mort ou presque et notre vitalité en mal de répondant trouvait parfois, dans le larcin, de quoi se rassasier un peu. Nous volions du pain dans la boulangerie laissée ouverte par un commerçant trop confiant, et parfois aussi, dans un panneau publicitaire, nous mesurions la force de nos coups de pieds et de nos coups de poing dans ce mobilier urbain dont nous sentions obscurément l’hostilité, et le fait qu’il s’élevait d’abord contre nous, contre nos jours, contre notre puissance et contre nos promesses.

Il y a vingt-cinq ans, alors que s’égrenait une à une, dans les quelques chaînes du tube cathodique, la succession interminables des crises qui ont marquées notre enfance et notre adolescence, nous comprenions déjà que toutes ces crises n’étaient chacune qu’un palier de plus vers la situation que nous connaissons aujourd’hui.

Que ces crises n’étaient que l’application entêtée d’un plan élaboré en dehors de toute volonté populaire. Chaque fois qu’on le répétait, ce mot perdait d’ailleurs un peu plus de son sens. Car des crises, il y en a eu un paquet, mais d’aucune de ces crises nous ne sommes jamais sortis. Elles s’additionnaient, au contraire, rendant simplement nos vies de plus en plus austères et moroses.

Déjà, il y a vingt-cinq ans, nous regardions notre ville se glacer, se vider de son sang comme par une blessure invisible, les enfants déserter les rues, les interdictions se multiplier, les cafés fermer, les quartiers se “ gentrifier ”. La ville, déjà, traçait en négatif un portrait de ses habitants en parias, voleurs et fraudeurs potentiels, et les regards croisés des caméras de surveillance qui se mirent à pulluler, achevaient de figer l’air glacial dans lequel nous étions censés être libres, égaux et fraternels.

Il y avait quelque chose de pourri au royaume de France. Et déjà, il y a vingt-cinq ans, nous nous disions entre nous : « ce n’est pas possible, ça ne va pas durer, ça ne peut pas durer, il faut qu’il se passe un truc. »

Samedi dernier, je me trouvais par hasard dans ce quartier de mon enfance. A peine sorti de la bouche d’un métro pourtant lointain (toutes les stations proches avaient été bouclées) un immense brouillard lacrymogène vous prenait à la gorge, accompagné, au loin, de la détonation des gli-F4, des grenades assourdissantes et du bourdon incessant des hélicos qui tournoyaient, çà et là, comme des mouches affolées, chassées par la queue d’un cheval.

Immédiatement, ces bruits, ces odeurs me replongèrent quelques mois en arrière, alors que j’arrivais, la nuit, sur la zone de Notre Dame des Landes, afin d’honorer ce serment que j’avais fait en plantant mon bâton dans le talus, de venir défendre la zone en cas d’attaque.

En quelques mois seulement, donc, le champ de bataille, ou plutôt la ligne de front, s’était déplacée de la zone boueuse du bocage nantais jusque sur l’asphalte de l’axe sacré du pouvoir républicain : celui qui mène de l’entrée du Louvre à la Grande Arche, en passant par la Pyramide, les Tuileries, la Concorde, où le phallus de l’obélisque, dressé très exactement sur le souvenir de l’échafaud de la Terreur, entre symboliquement sous l’Arche grandiloquent de l’Arc de Triomphe en empruntant les Champs Elysées.

Les mêmes sons, les mêmes odeurs, le même combat, avec, seule nuance, des CRS cette fois à la place des GM en guise de globules bleus. Mais cette fois, nous sentons clairement que cette énième crise n’en est plus vraiment une. Elle est plutôt l’aboutissement, l’ultime spasme de quarante années d’acharnement technocratique libéral, et elle frappe, pour la première fois avec autant de force, le centre géographique même de ce pouvoir, elle saccage ses symboles, elle brise la ligne de son axe.

Cette soi-disant crise des gilets jaunes vient de loin, nous le savons tous. Cette crise a l’âge de notre président qui se trouve aussi être le mien. Et s’il n’en sortira pas, c’est qu’il n’y est pas rentré, qu’elle ne fait qu’un avec son histoire, sa personne et les choix qui ont mené cet orgueilleux personnage à la fonction dite suprême. Ce n’est pas la politique d’Emmanuel Macron qui est en cause, c’est Emmanuel Macron lui-même.

Les slogans qui fusaient ce jour-là étaient assez éloquents sur ce point. Et le silence qu’il continue à leur opposer l’est tout autant. Ce dernier, en proclamant que les français étaient à la fois « monarchistes et régicides », ne savait sans doute pas à quel point il prophétisait sa propre destitution, et annonçait son destin presque christique de fils prodigue crucifié, de gendre idéal atomisé.

Car une chose, au moins, parait claire aujourd’hui : c’est que si l’avenir ne s’annonce pas tout rose et que le pire n’a pas encore dit son dernier mot, cette séquence politique de 40 ans a pris fin en ce jour. En regardant la nuit à la télé, les images de ce Grand Soir, après m’être moi-même joyeusement ébroué dans les gaz et les fumées des voitures incendiées toute l’après-midi, la chose crevait l’écran : le jeu était fini. Emmanuel Macron, quoi qu’il fasse, ne pourra plus gouverner.

S’il avance, il est foutu. S’il recule, il est foutu, s’il ne bouge pas, il est foutu. Echec et mat. Quoi qu’il fasse désormais, le roi est cerné à la fois par les fous, la tour et une myriade de pions habillés de jaune. Il suffisait, pour s’en rendre compte de voir l’expression profondément inquiète, presque terrifiée, de tous les représentants du gouvernement et de tous les « journalistes » assermentés qui tentaient désespérément de ne pas comprendre ce qui s’était passé.

La voix de Gérard Philippe avait pris, en une nuit, un bel octave vers le haut ; seul Castaner, en bon joueur de poker, arrivait encore à bluffer en surjouant son assurance virile, alors que tout le monde connaissait déjà l’étendue de son jeu : une paire de valets et quelques trèfles qui ne suffiront pas à lui porter chance.

En une journée à peine, avec une rapidité déconcertante, la peur a changé de camp. Hier encore, il s’agissait de prendre toutes les mesures pour rassurer les marchés, mais aujourd’hui on crie partout qu’il va falloir en prendre, et vite, pour apaiser la colère du peuple. Tout en sachant que cela ne suffira pas. Ce qui s’est passé est en somme assez simple et il est étonnant de voir encore ces figurines télévisuelles se demander « mais qui sont les gilets jaunes ? » Ne le savent-ils pas ? N’ont-ils pas des enfants à l’école, des aïeux en maison de retraite ? Ne sont-ils pas allés récemment à l’Hôpital ? N’ont-ils pas, eux aussi, un loyer à payer ? Un burn out qui couve ? Comment peut-on vivre dans ce pays et ne pas le comprendre ?

Faut-il que vous soyez si étrangers à notre pays, vous qui relayez sans cesse la crainte des autres, qu’ils soient migrants, sans papiers, sans domicile, fainéants, fraudeurs, chômeurs, gaulois réfractaires, tout simplement jeunes ou plus simplement encore, rien ?

C’est pourtant simple : la minorité qui a pris la rue ce soir-là s’appelle le peuple français et autour de la flamme du soldat inconnu, ce jour-là, nous avons pu entendre une presque émouvante marseillaise dans le claquement de drapeaux français et bretons.

Dans les rangs des manifestants, ou plutôt, des insurgés, il y avait des provinciaux, des parisiens, des black block, des ultras de la droite, des extrêmes de la gauche, des jeunes et des moins jeunes de banlieues, et l’énergie avec laquelle on tente désespérément, dans les médias, de bien les séparer trahit en réalité à quel point tout ce petit monde était momentanément uni, et fonctionnait concrètement de concert.

Chacun son rôle, les barricades pour les uns, les pancartes pour les autres, les slogans ou les pavés, les rôles s’échangeant volontiers. Car si l’on n’a pas beaucoup entendu de condamnations de la violence de la part des gentils gilets jaunes, c’est que, dans une alchimie sociale inespérée, ce jour-là, les jeunes de banlieues, les black block et tous les parias de ce pays ont exprimé la colère de tous ces gens normaux qui sont censé les haïr, et que ces derniers se sont reconnus dans cette colère jusqu’à y participer très activement.

Ces ennemis jurés ne sont peut-être que des alliés d’un jour, mais pour le pouvoir actuel, ce sera de toute façon une alliance fatale.

Même les commentateurs les plus circonspects admettent une situation au minimum insurrectionnelle, voire révolutionnaire. Ce qu’ils ne comprennent pas, c’est que dans le processus révolutionnaire, il n’y a plus d’un côté, les fachos, de l’autre les gauchos, d’un côté les bobos de l’autre les prolos. Car le processus révolutionnaire est un devenir où la partition sociale se rejoue, se refonde en brouillant toutes les cartes, les gilets jaunes cassent, les casseurs enfilent des gilets jaunes, on se rencontre, on fraternise, on se protège mutuellement, on articule nos compétences et nos volontés dans une stratégie commune contre un ennemi commun.

Dans la révolution, on se transforme, on cesse d’être ce que l’on est. Et paradoxalement, après toutes ces années où nous avons été montés les uns contre les autres, c’est dans la violence, la prise de risque et dans le brouillard des fumées lacrymales de ce jour, qu’on a vu se dessiner une sorte de France réconciliée que tous les bonimenteurs de la politique nous avait promis.

Pauvres journalistes, plus ils tentent de condamner la violence de ces actes inadmissibles, plus il apparaît clair que c’est justement cette violence inadmissible et ces débordements qui ont fait que pour une fois, nous avons été entendu. Cela tout le monde l’a bien compris. Ainsi, ironiquement, plus les commentateurs dénoncent cette violence, plus ils la valident comme seule stratégie payante, et plus ils font eux-mêmes en creux, sans le savoir, une apologie du terrorisme.

Nous l’avons bien compris, et c’est pourquoi nous recommenceront autant de fois qu’il le faut, à tous les futurs actes de cette tragédie libérale, à utiliser ce langage, celui des barricades, du feu, du débordement, du blocage, en un mot le langage de la force, jusqu’à ce que le roi, déjà nu, gicle de son trône. Et après ? On verra bien. Nous avons moins peur du chaos que de la poursuite de ce massacre.

Ce n’est sûrement pas une période de paix et des lendemains qui chantent qui s’annoncent aujourd’hui. Mais peut-être une passion retrouvée pour la chose commune, et une chance qui nous est donnée de faire dérailler le train qui nous projette ensemble dans le mur.

Qu’il soit déjà trop tard ou pas, finalement, cela ne nous regarde pas et qu’importe les pronostics. Car si nous ne savons pas où nous allons ni ce que l’avenir nous réserve, nous savons maintenant en revanche très bien ce que nous avons à faire, nous irons jusqu’au bout, et nous savons aussi que là est notre joie, notre désir autant que notre responsabilité.

Viktor ALMA

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10 décembre 2018 1 10 /12 /décembre /2018 09:47

Chaque voiture en France est censée être équipée d’un gilet jaune. Ainsi, en cas d’accident ou de panne sur une autoroute, le conducteur peut l’enfiler pour assurer sa visibilité et éviter de se faire écraser.

L’idée de porter votre gilet jaune pour manifester contre les mesures gouvernementales impopulaires s’est donc rapidement imposée. Le costume était à portée de main et n’avait pas besoin d’être fourni par Soros pour une certaine "révolution de couleur" plus ou moins spontanée. Le symbolisme était approprié : en cas d’urgence socio-économique, montrez que vous ne voulez pas être écrasé.

Comme tout le monde le sait, ce qui a déclenché le mouvement de protestation, c’est une nouvelle hausse des taxes sur le carburant. Mais il était tout de suite clair qu’il s’agissait de beaucoup plus que cela. La taxe sur le carburant a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase dans une longue série de mesures favorisant les riches aux dépens de la majorité de la population. C’est pourquoi le mouvement a atteint une popularité et un soutien presque instantanés.

Les voix du peuple

Les Gilets Jaunes ont tenu leurs premières manifestations le samedi 17 novembre sur les Champs-Elysées à Paris. C’était totalement différent des manifestations syndicales habituelles, bien organisées pour marcher sur le boulevard entre la Place de la République et la Place de la Bastille, ou l’inverse, en portant des banderoles et en écoutant les discours des dirigeants à la fin. Les Gilets Jaunes arrivés de nulle part, sans organisation, sans chef pour leur dire où aller ou haranguer la foule. Ils étaient juste là, dans les gilets jaunes, en colère et prêts à expliquer leur colère à tout auditeur prêt à les écouter.

En bref, le message était le suivant : nous n’arrivons pas à joindre les deux bouts. Le coût de la vie ne cesse d’augmenter et nos revenus continuent de baisser. On n’en peut plus, c’est tout. Le gouvernement doit s’arrêter, réfléchir et changer de cap.

Mais la première réaction du gouvernement a été d’envoyer la police pulvériser des torrents de gaz lacrymogène sur la foule, apparemment pour tenir la population à distance de la résidence présidentielle voisine, le palais de l’Elysée. Le président Macron était ailleurs, se considérant apparemment au-dessus de tout cela.

Mais ceux qui écoutaient pouvaient apprendre beaucoup de choses sur l’état de la France d’aujourd’hui. Surtout dans les petites villes et les zones rurales, d’où viennent de nombreux manifestants. La situation est bien pire que ce que les autorités et les médias à Paris ont laissé entendre.

Il y avait des jeunes femmes qui travaillaient sept jours sur sept et qui désespéraient de ne pas avoir assez d’argent pour nourrir et vêtir leurs enfants.

Les gens étaient en colère mais prêts à expliquer très clairement les enjeux économiques.

Colette, âgée de 83 ans, ne possède pas de voiture, mais a expliqué à qui veut bien l’entendre que la flambée du prix de l’essence nuirait aussi aux gens qui ne conduisent pas, en affectant le prix des aliments et autres produits de première nécessité. Elle avait fait ses calculs et pensait que cela coûterait 80 euros par mois à un retraité.

"Macron n’a pas fait campagne en promettant de geler les pensions", se souvient un gilet jaune, mais c’est ce qu’il a fait, tout en augmentant les impôts de solidarité des retraités.

Une revendication importante et récurrente concernait la question des soins de santé. La France dispose depuis longtemps du meilleur programme de santé publique au monde, mais ce programme est de plus en plus miné pour répondre au besoin premier du capital : le profit. Au cours des dernières années, une campagne gouvernementale de plus en plus importante a été menée pour encourager, puis ensuite obliger les gens à souscrire à une "mutuelle", c’est-à-dire une assurance maladie privée, prétendument pour combler "les lacunes" non couvertes par la couverture maladie universelle en France.

Les "écarts" peuvent être les 15% qui ne sont pas couverts pour les maladies ordinaires (les maladies graves sont couvertes à 100%), ou pour les médicaments retirés de la liste "couverte", ou pour les soins dentaires, entre autres choses. Les "lacunes" à combler ne cessent de s’accroître, de même que le coût de l’adhésion à la mutuelle.

En réalité, ce programme, vendu au public comme une amélioration modernisatrice, est une évolution graduelle vers la privatisation des soins de santé. C’est une méthode sournoise pour ouvrir tout le champ de la santé publique aux investissements financiers internationaux. Ce stratagème n’a pas dupé les gens ordinaires et figure en bonne place sur la liste des revendications des Gilets Jaunes.

La dégradation des soins dans les hôpitaux publics est une autre revendication. Il y a de moins en moins d’hôpitaux dans les zones rurales et il faut "attendre assez longtemps pour mourir" aux urgences. Ceux qui peuvent se le permettre se tournent vers les hôpitaux privés. Mais la plupart ne le peuvent pas. Les infirmières sont surchargées de travail et sous-payées. Quand on entend ce que les infirmières ont à endurer, on se rappelle qu’il s’agit effectivement d’une noble profession.

Tout cela m’a rappelé une jeune femme que nous avons rencontrée lors d’un pique-nique public dans le sud-ouest de la France l’été dernier. Elle s’occupe des personnes âgées qui vivent seules à la maison dans les zones rurales, allant de l’une à l’autre en voiture, pour les nourrir, les baigner, leur offrir un moment de bonne compagnie et de compréhension. Elle aime sa vocation, elle aime aider les personnes âgées, même si cela lui permet à peine de gagner sa vie. Elle fera partie de ceux qui devront payer plus cher pour se rendre d’un patient à l’autre.

Les gens paient volontiers des impôts lorsqu’ils obtiennent quelque chose en échange. Mais pas quand on leur enlève les choses auxquelles ils sont habituées. Les fraudeurs sont les super riches et les grandes entreprises avec leurs batteries d’avocats et de paradis fiscaux, ou des intrus comme Amazon et Google, mais les Français ordinaires ont été relativement habitués à payer des impôts en échange d’excellents services publics : soins de santé optimaux, transports publics de première classe, service postal rapide et efficace, enseignement universitaire gratuit.

Mais tout cela est attaqué par le règne du capital financier appelé ici "néolibéralisme". Dans les zones rurales, de plus en plus de bureaux de poste, d’écoles et d’hôpitaux sont fermés, les services ferroviaires non rentables sont supprimés en raison de la "libre concurrence" introduite par les directives de l’Union européenne - des mesures qui obligent plus que jamais les gens à prendre leur voiture. Surtout quand les grands centres commerciaux drainent les petites villes de leurs magasins traditionnels.

Politiques énergétiques incohérentes

Et la taxe annoncée par le gouvernement - 6,6 centimes de plus par litre pour le diesel et 2,9 centimes supplémentaires par litre d’essence - ne sont que les premières étapes d’une série d’augmentations prévues au cours des prochaines années. Ces mesures sont censées inciter les gens à conduire moins ou même mieux, à mettre à la casse leurs vieux véhicules et à acheter de belles voitures électriques neuves.

De plus en plus, la "gouvernance" est un exercice d’ingénierie sociale par des technocrates qui savent ce qui vaut le mieux. Cet exercice va directement à l’encontre d’une mesure gouvernementale antérieure d’ingénierie sociale qui utilisait des incitations économiques pour encourager les gens à acheter des voitures fonctionnant au diesel.

Maintenant, le gouvernement a changé d’idée. Plus de la moitié des véhicules personnels fonctionnent encore au diesel, bien que ce pourcentage ait diminué. Maintenant, on dit à leurs propriétaires d’aller acheter une voiture électrique à la place. Mais les gens qui vivent sur le fil du rasoir n’ont tout simplement pas les moyens de changer de véhicule.

En outre, la politique énergétique est incohérente. En théorie, l’économie "verte" inclut la fermeture de nombreuses centrales nucléaires en France. Sans elles, d’où viendrait l’électricité pour faire fonctionner les voitures électriques ? Et l’énergie nucléaire est "propre", sans CO2. Alors, que se passe-t-il ? Les gens se posent des questions.

Les sources d’énergie alternatives les plus prometteuses en France sont les marées fortes le long des côtes septentrionales. Mais en juillet dernier, le projet Tidal Energies sur la côte normande a soudainement été abandonné parce qu’il n’était pas rentable - pas assez de clients. C’est symptomatique de ce qui ne va pas avec le gouvernement actuel.

Les nouveaux grands projets industriels ne sont presque jamais rentables au départ, c’est pourquoi ils ont besoin de l’appui et des subventions du gouvernement pour démarrer, en prévision de l’avenir. De tels projets ont été soutenus sous de Gaulle, élevant la France au rang de grande puissance industrielle et apportant une prospérité sans précédent à l’ensemble de la population. Mais le gouvernement Macron n’investit pas dans l’avenir et ne fait rien pour préserver les industries qui subsistent. Sous sa direction, la société française Alstom, leader dans le secteur de l’énergie, a été vendue à General Electric.

En effet, il est parfaitement hypocrite de qualifier la taxe française sur l’essence d’"écotaxe" puisque les bénéfices d’une véritable écotaxe seraient investis dans le développement des énergies propres - comme les centrales marémotrices. Les bénéfices sont plutôt affectés à l’équilibre budgétaire, c’est-à-dire au service de la dette publique. La taxe macronienne sur l’essence n’est qu’une mesure d’austérité de plus - avec la réduction des services publics et la "vente des bijoux de famille", c’est-à-dire la vente de sources potentielles de revenus comme Alstom, les installations portuaires et les aéroports parisiens.

Le gouvernement n’a pas compris ce qui se passait.

Les premières réponses du gouvernement ont montré qu’il n’écoutait pas. Ils ont puisé dans leur sac aux clichés pour dénigrer quelque chose qu’ils ne voulaient pas se donner la peine de comprendre.

La première réaction du président Macron a été de culpabiliser les manifestants en invoquant l’argument le plus puissant des mondialistes pour imposer des mesures impopulaires : le réchauffement climatique. Quelles que soient les petites revendications que les gens peuvent avoir, a-t-il indiqué, ce n’est rien comparé à l’avenir de la planète.

Cela n’a pas impressionné les gens qui, oui, ont entendu parler du changement climatique et de la protection de l’environnement autant que quiconque, mais qui sont obligés de répondre : "Je suis plus inquiet pour ma fin du mois que pour la fin du monde".

Après le deuxième rassemblement des Gilets Jaunes, le samedi 25 novembre, qui a vu plus de manifestants et plus de gaz lacrymogènes, le ministre en charge du budget, Gérard Darmanin, a déclaré que ce qui avait manifesté sur les Champs-Elysées était "la peste brune", qui signifie fasciste. (Pour ceux qui aiment excorier les Français comme racistes, il faut noter que Darmanin est d’origine ouvrière algérienne). Cette remarque a provoqué un tollé d’indignation qui a révélé la sympathie de l’opinion publique pour le mouvement - plus de 70% d’approbation d’après les derniers sondages, même après les actes de vandalisme incontrôlés.

Le ministre de l’Intérieur de Macron, Christophe Castaner, a dû déclarer que la communication du gouvernement avait été mal gérée. Bien sûr, c’est l’excuse technocratique bien connue : nous avons toujours raison, mais tout est une question de "communication", et non de faits sur le terrain.

J’ai peut-être manqué quelque chose, mais parmi les nombreuses interviews que j’ai écoutées, je n’ai pas entendu un seul mot qui tomberait dans les catégories de "l’extrême droite", et encore moins du "fascisme" - ou même qui indiquerait une préférence particulière en ce qui concerne les partis politiques. Ces personnes sont entièrement préoccupées par des questions pratiques concrètes. Pas un soupçon d’idéologie – chose remarquable à Paris !

Certains, qui ignorent l’histoire de France et qui désirent montrer leur purisme gauchiste ont suggéré que les Gilets Jaunes sont dangereusement nationalistes parce qu’ils agitent parfois des drapeaux français et chantent La Marseillaise. Cela signifie simplement qu’ils sont français. Historiquement, la gauche française est patriotique, surtout quand elle se révolte contre les aristocrates et les riches ou pendant l’occupation nazie. C’est juste une façon de dire que nous sommes le peuple, que c’est nous qui bossons et que vous devez écouter nos griefs. Pour être mauvais, le "nationalisme" doit être agressif envers les autres nations. Ce mouvement n’attaque personne, il se cantonne à son territoire.

La faiblesse de Macron

Les gilets jaunes ont clairement fait comprendre au monde entier qu’Emmanuel Macron était un produit artificiel vendu à l’électorat par une campagne médiatique extraordinaire.

Macron était le lapin magiquement sorti d’un haut-de-forme, parrainé par ce qu’on doit appeler l’oligarchie française. Après avoir attiré l’attention de Jacques Attali, le jeune Macron fut embauché à la banque Rothschild où il a pu rapidement gagner une petite fortune, ce qui lui assure une fidélité de classe envers ses parrains. La saturation des médias et la campagne de peur contre Marine Le Pen "fasciste" (qui a par ailleurs raté son grand débat) ont mis Macron au pouvoir. Il avait rencontré sa femme alors qu’elle lui enseignait le théâtre, et maintenant il peut jouer au président.

La mission que lui ont confiée ses parrains était claire. Il doit poursuivre avec plus de vigueur les "réformes" (mesures d’austérité) déjà entreprises par les gouvernements précédents, qui avaient parfois hésité à hâter le déclin de l’Etat social.

Et au-delà, Macron était censé "sauver l’Europe". Sauver l’Europe, c’est sauver l’Union européenne du bourbier dans lequel elle se trouve.

C’est pourquoi il est obsédé par la réduction des dépenses et l’équilibre budgétaire. Parce que c’est pour cela qu’il a été choisi par l’oligarchie qui a parrainé sa candidature. Il a été choisi par l’oligarchie financière avant tout pour sauver l’Union européenne d’une désintégration menaçante provoquée par l’euro. Les traités instituant l’UE et surtout la monnaie commune, l’euro, ont créé un déséquilibre insoutenable entre les États membres.

L’ironie, c’est que les gouvernements français précédents, à commencer par Mitterrand, sont largement responsables de cet état de fait. Dans un effort désespéré et techniquement mal analysé pour empêcher l’Allemagne nouvellement unifiée de devenir la puissance dominante en Europe, les Français ont insisté pour lier l’Allemagne à la France par une monnaie commune. A contrecœur, les Allemands ont accepté l’euro - mais seulement aux conditions allemandes. Le résultat est que l’Allemagne est devenue le créancier involontaire d’États tout aussi involontaires, l’Italie, l’Espagne, le Portugal et, bien sûr, la Grèce ruinée. Le fossé financier entre l’Allemagne et ses voisins du sud ne cesse de se creuser, ce qui suscite la grogne de toutes parts.

L’Allemagne ne veut pas partager le pouvoir économique avec des États qu’elle considère comme irresponsables. La mission de Macron est donc de montrer à l’Allemagne que la France, malgré son économie chancelante, est "responsable", en serrant le vis à la population pour payer les intérêts de la dette. L’idée de Macron est que les politiciens à Berlin et les banquiers à Francfort seront tellement impressionnés qu’ils se retourneront et diront, bravo Emmanuel, nous sommes prêts à mettre notre richesse dans un pot commun au profit des 27 États membres. Et c’est pourquoi Macron ne reculera devant rien pour équilibrer le budget, pour que les Allemands l’aiment.

Jusqu’à présent, la magie Macron ne fonctionne pas sur les Allemands, et elle pousse son propre peuple dans les rues.

Mais sont-ils réellement son peuple ? Macron se préoccupe-t-il vraiment de ses compatriotes qui ne font que travailler pour gagner leur vie ? Tout le monde s’entend pour dire que ce n’est pas le cas.

Macron est en train de perdre le soutien des gens dans la rue et des oligarques qui l’ont parrainé. Il ne fait pas son travail.

L’ascension politique de Macron - véritable lapin sorti du chapeau - lui laisse peu de légitimité, une fois que la lueur des couvertures satinées des magazines s’estompe. Avec l’aide de ses amis, Macron inventa son propre parti, La République en Marche. Il a peuplé son parti avec des individus de la "société civile", souvent des entrepreneurs de taille moyenne sans expérience politique, plus quelques transfuges du Parti socialiste ou du Parti républicain, pour occuper les postes gouvernementaux les plus importants.

La seule recrue bien connue de la "société civile" était l’activiste écologique, Nicolas Hulot, qui s’est vu confier le poste de ministre de l’Environnement, mais qui a brusquement annoncé sa démission à la radio en août dernier, en citant sa frustration.

Le plus fervent partisan de Macron dans la classe politique était Gérard Collomb, maire socialiste de Lyon, qui s’est vu confier le poste de ministre de l’Intérieur, chargé de la police nationale. Mais peu après le départ de Hulot, Collomb a dit qu’il partait aussi pour retourner à Lyon. Macron l’a supplié de rester, mais le 3 octobre, Collomb a démissionné, avec une déclaration étonnante faisant référence aux "immenses problèmes auxquels son successeur devait faire face. Dans les "quartiers difficiles", dit-il, la situation est "très dégradée : c’est la loi du plus fort qui règne, les trafiquants de drogue et les islamistes radicaux ont pris la place de la République". Ces banlieues doivent être "reconquises".

Après une telle description de poste, Macron a eu du mal à recruter un nouveau ministre de l’Intérieur. Il a tâtonné et a trouvé un ami qu’il avait choisi pour diriger son parti, l’ex-socialiste Christophe Castaner. Diplômé en criminologie, l’expérience principale de Castaner le qualifiant pour diriger la police nationale serait sa fréquentation dans sa jeunesse avec un Mafioso marseillais, apparemment dû à son penchant pour le poker et la consommation de whisky dans des tanières clandestines.

Le samedi 17 novembre, les manifestants ont manifesté pacifiquement, mais ils n’ont pas apprécié les lourdes attaques au gaz lacrymogène. Samedi 25 novembre, les choses ont été plus dures, et le samedi 1er décembre, ce fut l’enfer. Sans chefs ni service d’ordre, il était inévitable que des casseurs entrent en scène et commencent à tout casser, à piller des magasins et à mettre le feu aux poubelles, aux voitures et même aux immeubles.

Pas seulement à Paris, mais dans toute la France : de Marseille à Brest, de Toulouse à Strasbourg. Dans la ville reculée du Puy en Velay, connue pour sa chapelle perchée sur un rocher et sa dentelle traditionnelle, la préfecture a été incendiée. Les touristes annulent leurs réservations, les restaurants chics se vident et les grands magasins craignent pour leurs vitrines de Noël. Les dommages économiques sont considérables.

Pourtant, l’appui pour les gilets jaunes demeure élevé, probablement parce que les gens sont capables de faire la distinction entre les citoyens en déshérence et les vandales qui sèment la destruction.

Lundi, il y a eu de nouvelles émeutes dans les banlieues troublées dont Collomb avait parlé en se retirant à Lyon. Il s’agissait d’un nouveau front pour la police nationale, dont les représentants ont fait savoir que tout cela devenait beaucoup trop difficile à gérer pour eux. L’annonce de l’état d’urgence ne résoudra probablement rien.

Macron est une bulle qui a éclaté. La légitimité de son autorité est très fortement remise en question. Pourtant, il a été élu en 2017 pour un mandat de cinq ans, et son parti détient une large majorité au Parlement, ce qui rend sa destitution presque impossible.

Alors, quelle est la suite ? Bien qu’ils aient été mis à l’écart par la victoire électorale de Macron en 2017, les politiciens de tous bords tentent de récupérer le mouvement - mais discrètement, car les Gilets Jaunes ont manifesté leur méfiance à l’égard de tous les politiciens.

Ce n’est pas un mouvement qui cherche à prendre le pouvoir. Il cherche simplement à obtenir réparation de ses griefs. Le gouvernement aurait dû d’abord écouter, accepter les discussions et les compromis. Cela devient de plus en plus difficile avec le temps, mais rien n’est impossible.

Pendant deux ou trois cents ans, les gens que l’on pourrait appeler "de gauche" espéraient que les mouvements populaires entraîneraient des changements pour le mieux. Aujourd’hui, de nombreux gauchistes semblent terrifiés par les mouvements populaires pour le changement, convaincus que le "populisme" doit conduire au "fascisme".

Cette attitude est l’un des nombreux facteurs indiquant que les changements à venir ne seront pas menés par la gauche telle qu’elle existe aujourd’hui. Ceux qui craignent le changement ne seront pas là pour aider à le réaliser. Mais le changement est inévitable et ne doit pas nécessairement être pour le pire.

Diana Johnstone
Paris, 3 décembre 2018

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30 novembre 2018 5 30 /11 /novembre /2018 00:20

Depuis le 17 novembre 2018, les travailleurs et citoyens "gilets jaunes" sont dans l’action contre cette énième agression contre nos intérêts de classe qu’est l’augmentation du prix du carburant par le biais d’une nouvelle taxe. Ce mouvement dans un contexte colonial prend la forme d’un quasi-insurrection populaire à l’Île de la Réunion.

Nous savons tous que le prétexte "écologique" à ce nouvel renchérissement de la vie des travailleurs et nos familles, est un faux et usage de faux permanent comme l’ont été tous les prétextes pour justifier la "loi travail", "les réformes Macron" que nous avons combattu avec courage de toutes nos forces sans les stopper.

Deux faits récents démontrent à suffisance le mensonge attrape-nigaud Macronien de "taxe pour l’écologie" : L’écolo-libéral de service qu’est N. Hulot, après avoir ravalé ses promesses non tenues, a jeté l’éponge sans aucune dignité et la longue grève de nos camarades cheminots contre une libéralisation-privatisation anti-écologique de la SNCF.

Nous savons aussi d’expérience qu’à chaque lutte que nous menons, l’intoxication et la manipulation gouvernementale, patronale et médiatique sont systématiques pour dénaturer, isoler notre combat voire dresser le reste de la population contre nous. Ces procédés montrent que le mensonge fait partie des méthodes de manipulation des exploiteurs capitalistes et de leurs commis gestionnaires de l’appareil d’Etat dans leur lutte de classe contre le monde du travail.

Rejetons le mensonge de "fascistes" pour caractériser la lutte des "gilets jaunes"

Dès l’annonce de leurs actions de blocage, les média-mensonges ont été utilisés le mot "taxe" pour dénoncer le "poujadisme". Ensuite a été mise en avant le fait que "c’est un mouvement pas organisé et sans leader" pour suggérer "la récupération par l’extrême droite". Pour jeter l’opprobe sur ces actions combatives de la colère populaire, la propagande bourgeoise et gouvernementale jusqu’ici férocement anti-syndicale, en particulier anti-CGT, a connu brusquement une mue pour vanter les "syndicats qui, au moins, déclarent leurs parcours, sont organisés et sont des interlocuteurs responsables" (sic !).

Contre cette révolte spontanée de masse (300.000 selon la police et 1 million 400.000 selon la presse étrangère), le gouvernement loue les services des "corps constitués" syndicaux présentés comme des démembrements républicains du système qui ne tolère le droit constitutionnel de manifester tant que çà ne bloque pas l’économie. C’est exactement par ce même procédé que limite la démocratie JC Juncker de la Commission Européenne quand il dit que : « Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens ».

La caractérisation de "fascisme" des "gilets jaunes" est un sous produit de la caractérisation de "populiste" que l’on balance à tout propos dès qu’on fait référence au peuple. L’élite bourgeoise et ses thuriféraires ne supportent pas que la "populasse", les "prolos", les artisans, les auto-entrepreneurs, des Ubérisés, les petits commerçants ou patrons des PME et PMI, bref que le peuple se mêle des affaires de la cité, des affaires du pays et disent STOP à l’engraissement sans fin des Actionnaires du CAC40, des firmes monopolistes au détriment de tous.

QUI donc veut coûte que coûte nous faire croire que la colère populaire est "populiste"et "fasciste" ? Il suffit de voir les revendications qu’expriment le ras le bol de la vie chère et contre QUI (gouvernement et patronat) sont-elles avancées pour comprendre que la propagande de Macron taxant de "fasciste" et celle de l’extrême droite fasciste déclamant son "soutien" veulent nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Macron cherche tout simplement à fabriquer l’adversaire dont-il a besoin. Le faux duel "droite/gauche" est démasqué, il s’agit maintenant de le remplacer par un autre faux duel "républicain/populiste", "européiste/nationaliste", "démocrate/fasciste".

REFUSONS D’ETRE LES IDIOTS UTILES QUI CONFONDENT LE DOIGT ET LA CHOSE QU’IL DESIGNE. C’est ce que nous devenons de fait si nous nous laissons prendre à ce piège qui nous met ainsi dans le camp du président ultralibéral Macron et des Multinationales de l’essence et du diesel. Refusons d’être des BRISEURS DE LUTTES contre des travailleurs en lutte au nom de la formule confusionniste et hypocrite selon laquelle "la CGT ne manifeste pas avec l’extrême droite", ce qui est une façon de dire que les "gilets jaunes sont fascistes".


Ce que nous devons retenir c’est la justesse et la légitimité des revendications que nous partageons et à partir de là faire en sorte que, comme dans les grèves que nous organisons, tous les travailleurs soient unis dans le combat sur la base de leurs intérêts de classe au delà de leur croyance, leur religion ou pas, leur choix politique personnel .

Les fascistes ne peuvent dévoyer que si nous faisons la politique de la chaise vide dans le mouvement social, que si nous leurs laissons par stupidité et trahison syndicale le terrain du combat social pour la satisfaction des revendications des masses contre la vie chère qui est synonyme de refus de la hausse des prix et donc de la baisse par ce moyen des salaires. La nature a horreur du vide.

Syndicalisme de classe et de masse

A peine 8% de syndiqués dont près des 4% sont CGT. Nous sommes loin de faire le plein du syndicalisme de masse et de classe. Nous savons tous que les taxes (tipp, csg, tva, etc) et la nouvelle taxe sur le diesel servent à FAIRE PAYER LA CRISE DU CAPITALISME, ses déficits, ses dettes, PAR LES TRAVAILLEURS.

Depuis 40 ans l’offensive libérale a pour objectif : LA BAISSE DES SALAIRES. Les principaux moyens pour réaliser cela sont la hausse des prix, le blocage des salaires, l’embauche de précaires dans le privé (intérim, cdd, saisonniers, journaliers, etc) et dans le public (vacataires, contractuels, cdd, cdi, etc). Tous les travailleurs du secteur privé et du secteur public sont de plus en plus frappés.

C’est se tirer une balle dans le pied pour le syndicalisme et en particulier pour la CGT que de se positionner en spectateur du combat des "gilets jaunes" au nom du fait que "ceux et celles qui sont dans l’action étaient absents du combat contre la loi travail et les contre-réformes Macron" ou encore parce " la hausse des salaires n’est pas clairement revendiquée", etc.


Être hors de cette expression massive du ras le bol par la mobilisation des "gilets jaunes" pour de tels prétextes, c’est se tromper de colère, c’est dévoyer sa colère contre d’autres travailleurs et non le patronat et son gouvernement, c’est donner un coup de sabre à la nécessaire unité des travailleurs, c’est marquer un but contre son propre camp au profit des patrons et de son gouvernement avant de se lamenter demain que les travailleurs ne répondent pas à notre appel.

Être avec eux et elles dans l’action, c’est justement faire grandir la conscience de la nécessité d’un cahier revendicatif mieux élaboré, de l’unité de classe et des masses pour stopper et vaincre les agressions anti-sociales du grand patronat et du pouvoir politique libéral à son service.

A y regarder de plus près, ce mouvement des "gilets jaunes" peut et doit être considéré comme l’entrée dans le combat social des "abstentionnistes" jusqu’ici très souvent non grévistes dans les combats que nous avons mené contre la destruction des conquis sociaux gagnés de haute lutte par nos anciens. Ils et elles sont aussi très souvent "abstentionnistes" dans les urnes lors des élections pour savoir qui parmi les politiciens au service de la bourgeoisie va régner pendant 5 ans.

Les "gilets jaunes" annoncent donc l’entrée en scène de la partie passive du monde du travail, celle qui avait confiance au système bourgeois, celle qui patientait jusqu’ici, celle qui acceptait de serrer la ceinture en attendant le "ruissellement promis".

Mais les "gilets jaunes" sont aussi ceux et celles qui commencent justement à comprendre qu’ils ont été les dindons de la farce du "ruissellement promis" alors que les fraudes fiscales et les dividendes (plus-value) en milliards d’euros des grands patrons du CAC40 s’étalent au grand jour.

Opportunité et tournant pour le syndicalisme CGT

Les luttes de ces dernières années après la lourde défaite sur la retraite de 2010 ont été marquées par une poussée combative de la CGT qui a montré à la fois le frein du réformisme opportuniste encore pesant à la tête et les limites de nos forces organisées de la base.

De la loi travail, aux ordonnances Macron jusqu’à la dernière lutte des cheminots, la base CGT suivies de Solidaires, nous avons mené un combat qui, même si il n’a pas permis d’arrêter l’attaque patronale et gouvernementale, nous mettait sur le chemin de victoires à venir. Il y a énormément de luttes défensives et partiellement offensives dans les taules qui se soldent par des victoires partielles et locales.

NOTRE POINT FAIBLE EST LE MANQUE D’UN CALENDRIER DE LUTTES INTERPROFESSIONNELLES CONFÉDÉRALES, L’EXPRESSION CONFÉDÉRALE DE LA COLÈRE QUI SOURD DANS LES LIEUX DE TRAVAIL ET DANS LES FOYERS, LE REFUS DU PRETENDU "DIALOGUE SOCIAL" ATTRAPE-NIGAUD QUI CRÉENT UN CERTAIN MANQUE DE CONFIANCE DANS LE SYNDICAT DE LA PART DES TRAVAILLEURS SYNDIQUES OU NON SYNDIQUES MAJORITAIRES.

N’oublions pas les scandales que l’adversaire de classe s’empresse de diffuser en confondant délibérément l’ivraie et la bonne graine syndicale.


L’intégration du syndicalisme dans le système de la République bourgeoise pour en faire un élément des "corps constitués" est à terme la mort du syndicalisme de classe et de masse radicalement défenseur des intérêts du monde du travail contre les intérêts du capital.

Le mouvement des "gilets jaunes" hors du syndicalisme est une punition des dérives réformistes, carriéristes et de l’opportunisme du syndicalisme opportuniste trop perçu pas toujours à tort comme une caste aristocratique et bureaucratique légaliste qui n’organise plus la colère et la combativité revendicative des masses laborieuses exploitées. Ce syndicalisme là est bien entendu des composantes CFDT, FO, UNSA du "syndicalisme rassemblé" et qui par ce biais malheureusement déteint sur la tête de notre CGT.

Le mouvement des "gilets jaunes" fusionne salariés, retraités, chômeurs, précaires, artisans, paysans, petits commerçants, petits patrons de PME/PMI, etc. contre la vie chère. Il y a parmi eux des gens du peuple qui sont de droite, socialistes, anti-libéraux de gauche, communistes, anarchistes, sans étiquette politique pour la majorité et même d’extrême-droite.

Ce qu’ils, qu’elles ont en commun, c’est le REFUS DE LA VIE CHÈRE DONT ILS, ELLES SONT VICTIMES. C’est là où réside la RAISON FONDAMENTALE DE NOTRE ENGAGEMENT AVEC EUX ET ELLES POUR STOPPER LA BROYEUSE SOCIALE QUI APPAUVRIT LE PEUPLE, LIQUIDE NOS CONQUÊTES DÉMOCRATIQUES ET DÉTRUIT NOS CONQUIS SOCIAUX.

Ce texte est un appel aux UL, UD, UP , CCN pour qu’à l’instar du NON AU TCE, LA CGT PRENNE TOUTE SA PLACE ET SOIT AVEC LES "GILETS JAUNES" POUR QUE VIVE LE SYNDICALISME DE CLASSE ET DE MASSE QUI A PERMIS DE GAGNER TANT DE CONQUIS SOCIAUX ET DÉMOCRATIQUES EN 36, 45, 68.

NOUS DEVONS ÊTRE DIGNES DE NOS ANCIENS ET MÉDITER CET ENSEIGNEMENT DU GRAND RÉVOLUTIONNAIRE PROLÉTARIEN SOVIÉTIQUE LENINE : "Quiconque attend une révolution sociale ’pure’ ne vivra jamais assez longtemps pour la voir. Il n’est qu’un révolutionnaire en paroles qui ne comprend rien à ce qu’est une révolution. (...) La révolution...ne peut pas être autre chose que l’explosion de la lutte de masse des opprimés et mécontents de toute espèce.

Des éléments de la petite bourgeoise et des ouvriers arriérés y participeront inévitablement : sans cette participation, la lutte de masse n’est pas possible, aucune révolution n’est possible. Et tout aussi inévitablement, ils apporteront au mouvement leurs préjugés, leurs fantaisies réactionnaires, leurs faiblesses et leurs erreurs.

Mais objectivement, ils s’attaqueront au capital, et l’avant-garde consciente de la révolution, le prolétariat avancé, qui exprimera cette vérité d’une lutte de masse disparate, discordante, bigarrée, à première vue sans unité, pourra l’unir et l’orienter, conquérir le pouvoir, s’emparer des banques, exproprier les trusts haïs de tous (bien que pour des raisons différentes) et réaliser d’autres mesures... dont l’ensemble aura pour résultat le renversement de la bourgeoisie et la victoire du socialisme".

Alors tous avec les "gilets jaunes" pour dire à MACRON le président des milliardaires : "Les automobilistes, les travailleurs, les sans papiers/réfugiés/migrants ne sont pas des vaches à lait".

21/11/2018

Roland Diagne

membre des Commissions Exécutives de la CGT Educ’Action Nord, de la FERC-CGT, de l’UD CGT Nord, de l’UL CGT Tourcoing.

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29 novembre 2018 4 29 /11 /novembre /2018 00:20

Mobilisation des « gilets jaunes », 17 novembre 2018 : Les leçons populaires de l’action des gilets jaunes

Dénigrés par les directions confédérales CFDT, FO, FSU, UNSA, et hélas aussi par les directions nationales de la CGT et de la FSU, les « gilets jaunes » n’y sont pas allés par quatre chemins :

# Ils n’ont pas appelé au « dialogue social » bidon avec Macron pour savoir comment « accompagner syndicalement » la casse sociale et désamorcer les luttes, comme n’a cessé de le faire M. Berger et ses suiveurs

# Ils n’ont pas déclaré partout que « Macron est légitime », comme l’ont fait la plupart des dirigeants confédéraux, sans oublier ceux du PCF et de la fausse gauche, ils ont carrément cerné l’Elysée, repris en chœur le refrain insurrectionnel de la Marseillaise et crié sans complexe « Macron démission ! »

# Et leur détermination de masse a placé sur la défensive ce gouvernement thatchérien de brutes patronales qui, d’ordinaire, provoque le monde du travail, dénigre le peuple français, gave les super-riches de cadeaux fiscaux, rampe devant l’UE de Merkel et multiplie les mauvais coups contre la France populaire : casse des statuts, de la Sécu, des retraites, du Code du travail, taxation des pensions, augmentation de la CSG, privatisations du domaine public, blocage des salaires de la fonction publique, démolition du bac national et de l’université à la française. Désormais, le micro-Bonaparte de l’Elysée est gravement discrédité et son autorité sur les classes populaires et moyennes est lourdement compromise : ce n’est pas le PRCF, qui n’a jamais appelé à voter pour ce triste sire, qui s’en plaindra.

Bien entendu, le caractère inorganisé du mouvement et l’indécente volonté de récupération de Wauquiez, Le Pen et Dupont-Aignan, ouvre un espace important à la réaction qui voudrait dévoyer le mouvement en le tournant contre le « fisc » et « l’Etat », c’est-à-dire contre les services publics, alors que c’est la répartition de la charge fiscale et son utilisation au profit de tous, et d’abord, des couches populaires, qui doivent être profondément réformées à l’avantage du Travail et aux dépens du Capital.

Participer dynamiquement à ces mouvements : le blocage des rues doit s’accompagner du blocage du profit capitaliste

Raison de plus pour les militants franchement communistes et pour les syndicalistes combatifs de participer dynamiquement à ces mouvements dans des formes à apprécier localement, de leur apporter l’expérience organisationnelle du mouvement ouvrier, de leur faire comprendre que les vrais communistes, la vraie gauche populaire, les syndicalistes de classe n’ont rien de commun avec les dirigeants nationaux caricaturaux qui usurpent ces beaux noms pour colmater les brèches de la société capitaliste de plus en plus inhumaine.

Aux militants d’avant-garde, non pas de donner des leçons à ceux qui mènent parfois la première lutte de leur vie, mais de leur montrer que le blocage des rues doit s’accompagner du blocage du profit capitaliste, de la construction de la grève générale interpro, d’une revendication claire d’augmentation générale des salaires et des pensions, d’une reconstruction des services publics et de la protection sociale détruits au nom de la « construction » européenne, de la remise en route du « produire en France » trahi par le grand patronat : en un mot d’une véritable lutte anticapitaliste comme celles de 1936 et de 1968 qui avaient abouti à d’immenses avancées sociales tout en posant la question du changement de société.

C’est de cela en réalité qu’a peur Macron, cet aventurier politique discrédité dont l’arrogance de classe a eu le mérite de déciller de nombreux citoyens.


Maintenant que le mouvement social est lancé, en refusant le faux apolitisme de certains manifestants arriérés qui tirent le mouvement en arrière, et tout en combattant à boulets rouges la droite et l’extrême droite, les militants franchement communistes continueront d’y participer au premier rang, de contribuer à l’élargir, d’apporter avec modestie mais sans frilosité les explications nécessaires, à porter dans les luttes la perspective d’une République sociale et souveraine 100% émancipée de l’UE supranationale et du système capitaliste, à appeler à la reconstruction du syndicalisme de classe trahi et à celle d’un parti communiste de combat.

Construire l’organisation politique permettant aux travailleurs de diriger le combat jusqu’à la victoire finale

Car moins que jamais, n’en déplaise aux éléments retardataires et aux hypocrites qui refusent d’assumer la dimension politique de tout mouvement de masse, il ne faut opposer l’auto-organisation des travailleurs « en bas » et la nécessité d’une organisation politique de combat permettant aux travailleurs de diriger, jusqu’à la victoire finale, le combat contre l’injustice sociale.

Georges GASTAUD secrétaire national du PRCF,
Jo HERNANDEZ commission luttes du PRCF,
GILLIATT JRCF.

Les illustrations sont du Grand Soir.

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18 octobre 2018 4 18 /10 /octobre /2018 23:20


Communiqué de Sud PTT : Le 21 juin 2018, Christophe, facteur à Lyon était violemment interpellé par la police municipale de Mr Collomb et placé 4 heures de garde à vue. Son crime ? Mauvais stationnement lors de la distribution de ses colis. Conséquence des contions de travail calamiteuses, des milliers de facteurs et factrices sont obligé·e·s de se garer tous les jours dans les mêmes conditions.

 

Communiqué de Sud PTT

La violence de l’intervention policière a par ailleurs été filmée par un témoin. Elle a été tellement choquante que Michel Noir (ancien maire et présent au moment des faits) a interpellé les policiers fautifs en ces termes : « Vous êtes en train de détruire l’image de la police municipale ».

La direction de La Poste n’a pourtant pas hésité. Le facteur est coupable ! Dans un premier temps, elle a refusé d’accorder l’aide juridictionnelle, pourtant statutaire, en affirmant que cette affaire s’est bien déroulée sur le lieu de travail mais n’a rien à voir avec le professionnel ! Cette attitude est inadmissible.

Alors que tous les facteurs et les factrices peuvent être confronté-es à cette situation, La Poste lance un message clair : aucun soutien pour ses personnels !

Christophe n’est pas au bout de ses peines. La direction de La Poste a décidé de le sanctionner pour refus d’obtempérer et planifie son licenciement.

Le conseil de discipline est d’ailleurs prévu le 16 octobre. Un véritable scandale !

Tout aussi scandaleuse, la convocation le 15 novembre, de Christophe au tribunal correctionnel pour, entre autres griefs, coups volontaires. Les images vidéo et les témoins sont pourtant unanimes.

Christophe a été violenté, il n’est pas l’agresseur ! Il est tout aussi indispensable de se mobiliser contre l’impunité policière !

Sud-PTT réaffirme son soutien à Christophe, et mettra tout en oeuvre contre l’injustice dont il est victime. La mobilisation du personnel et des associations de défense des droits de l’Homme que nous contactons doit permettre de défendre la dignité de Christophe.



 

Mots-clés

La Poste   /    Répression   /    Notre classe

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