Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
28 janvier 2021 4 28 /01 /janvier /2021 01:55

Au capitaine Pernoud : « Honneur et gloire à qui le mérite ! »- ¡ Que viva el pueblo !

Un grand journaliste français, Georges Pernoud, vient de larguer ses amarres pour naviguer au-delà de l’horizon cap vers la mer de l’éternité.

Au Venezuela, peu sont ceux qui le connaissent, mais pour ce que nous lui devons, je le présente à sa mémoire.

Producteur de télévision pendant 40 ans, il a créé et animé l’émission Thalassa (déesse de la mer dans la mythologie grecque) dédiée à ceux qui vivent de la mer et pour sa protection écologique. Thalassa, avec une large audience internationale, a réalisé 1.704 émissions.

Voici l’histoire de notre rencontre avec Georges Pernoud.

En 2006, grâce à Antoine Mora, l’un de ses reporters avec qui nous étions en contact, son attention a été retenue par notre loi avec ses limites à 10 milles des côtes pour le chalutage comme protection de la pêche artisanale. Il envoya ainsi son reporter avec une équipe pour tourner un programme sur notre pêche artisanale dans l’est du Venezuela.


Antoine Mora et Jean Araud

L’équipe a commencé ses prises de vue, dont des interviews avec les pêcheurs, qui, étonnamment, témoignaient de plus : des crédits reçus pour leurs barques, moteurs et équipements de pêche ; d’un peuple protagoniste et participatif ; d’un programme Robinson pour leurs enfants (scolarisation gratuite) ; d’un programme Mercal (épiceries fournissant de produits alimentaires à moindre coût) et d’une clinique mobile avec des médecins cubains (soins médicaux également gratuits).

Surpris par ces témoignages, en bons reporters, ils ont enquêté et découvert entre autres « … une révolution bien en marche » et que derrière tout cela « … il y avait un nom : Hugo Chavez ».

Ils ont alors eu envie de l’interviewer, sans succès, mais grâce à l’équipe composée du Ministre de la Communication et de l’Information Willian Lara, de la Vice-Ministre Teresita Maniglia et de la Directrice des Médias Internationaux Zaida Rauseo, ils ont reçu une invitation du Commandant-Président à un événement au port de Güiria, et ils ont été témoins de la manière dont le peuple acclamait son leader.

Et ils sont repartis pour Paris avec leurs images et leurs interviews.

Thalassa avait pour éthique de présenter à son public les réalités, à l’opposé d’autres grands médias français servant d’autres types d’intérêts.

Cette émission sur le Venezuela a été diffusée dans 90 pays, présentée ainsi :

“¡ Que viva el pueblo ! Thalassa vous emmène aujourd’hui au Venezuela pour voir la révolution bolivarienne en marche. La politique d’Hugo Chavez a fait parler de ce pays dans le monde entier, en bien comme en mal. Depuis l’arrivée à la présidence de la République d’Hugo Chavez en 1999, le Venezuela a subi de profondes réformes sociales.

Les programmes de santé, d’éducation, d’alphabétisation et de logement profitent à la population qui, après 40 ans de politique inefficace, marquée par la corruption, a vécu dans la misère et l’exclusion. Ainsi à El Morro, un petit village, la vie des pêcheurs a radicalement changé. « 

Mais l’histoire ne termina pas ainsi. Découvrant l’émission sur les chaînes internationales, l’opposition radicale est allée jusqu’à accuser le reporter d’avoir été « acheté » et a même tenté de suggérer son licenciement.

Cette histoire provient d’une source absolument fiable : je l’ai partagée, vue et vécue.

Au capitaine Pernoud, bon vent et bonne mer pour son éternelle navigation !

Du Venezuela, l’accompagne notre « Honneur et Gloire à qui le mérite ! », notre expression en hommage à ceux que nous honorons pour leurs actions.

Jean ARAUD

Pour voir le documentaire :

»» Les 2 Rives

Partager cet article

Repost0
18 janvier 2021 1 18 /01 /janvier /2021 02:51
 

L’assemblée générale des travailleurs·euses de la culture appelle à rejoindre la mobilisation nationale du 19 janvier !

Nous travailleurs·euses de la culture, réuni·es en assemblée générale de lutte le 7 janvier 2021, constatons le marasme dans lequel est plongé notre secteur. Nos structures comme nos emplois se trouvent aujourd’hui menacés. Cette crise affecte déjà nos conditions d’existence et elle continuera à le faire dans les années qui viennent. Face à cette situation nous exigeons dès aujourd’hui des gestes forts du gouvernement :

  • Prolongation de l’année blanche jusqu’à un an après la reprise réelle du travail dans tous les secteurs
  • Retrait pur et simple de la réforme de l’assurance chômage
  • Aides massives au secteur, passant par un plan de relance ambitieux en concertation avec les salarié.es de la culture
  • Abaissement du seuil d’heures pour permettre aux primo-entrants et personnes en rupture de droits d’accéder plus facilement à l’indemnisation
  • Maintien de tous les droits sociaux (maladie, retraite, maternité, prévoyance, formation)
  • Arrêt des sacrifices de secteurs entiers au nom de la politique de prévention

Le gouvernement, plus enclin à offrir des cadeaux aux capitalistes, laisse les plus précaires d’entre nous sans solution. Il multiplie les aides au patronat sans investir dans la santé, l’éducation ou la culture. Nous refusons cette société.

Nous sommes solidaires de toutes celles et ceux que cette crise laisse encore plus sur le carreau. Face à cela, seule la lutte peut nous rendre victorieux·euses. C’est pourquoi nous appelons à une mobilisation le 19 janvier.

- Manifestation - 12h30 devant l’Opéra (Place de la comédie, 69002 Lyon)
- Assemblée Générale - 14h30 au théatre Comédie Odéon (6 Rue Grolée, 69002 Lyon)

Venez avec des masques couleur unis, barrés d’une croix, symbolisant notre mutisme forcé

L’assemblée générale des professionnels et étudiant.es des arts et de la culture du 07 janvier 2021

 

Documents associés à l'article :

Mardi 19 Janvier 2021

La culture ne doit pas payer leur crise

 12h30 - 14h00
 Opéra

1 place de la Comédie 69001 Lyon

Mardi 19 Janvier 2021

La culture ne doit pas payer leur crise

 14h30 - 16h00
 Théâtre de l’Odéon

6 Rue Grolée, 69002 Lyon

Partager cet article

Repost0
4 janvier 2021 1 04 /01 /janvier /2021 01:43
Ils ont à notre disposition un mode d’emploi de la vie, sans la vie

La mise à l’arrêt des remonte-pentes ne m’a pas remonté le moral. Je fais grise mine car j’ai la conviction d’être gouverné par une férocité bourgeoise, comme l’écrivit Pasolini dans « La rabia », avide de rentes et prête à sacrifier le peuple pour l’Unité d’une Europe libérale alignée sur les lois du marché peu soucieuses des communs qui font la cohésion et l’identité d’un peuple.

Or, Emmanuel Macron, fiévreux ou non, ce qui ne change rien, ne cesse de nous abreuver, jusqu’à la nausée, de segments de sa pensée où, s’il avoue désormais faire parti des gaulois récalcitrants, il montre à quel point il ne supporte pas vraiment la parole des autres. Il craint tout simplement ce qu’il nomme le commentaire permanent au nom d’une hiérarchie de la connaissance et de l’intelligence qu’il confond assez souvent.

Pourtant quoi de plus légitime pour un peuple dans sa diversité que de tenter d’y voir clair, de la ramener, quoi ! Avec son entêtement de ne pas chercher à comprendre en dehors de ses choix, une lecture de Spinoza lui ferait le plus grand bien, il montre clairement que son principal souci est de trouver comment taire l’évocation fréquente du doute, le foisonnement des questions qui, au fond, ne sont que les manifestations d’une volonté de comprendre et d’y voir plus clair...


Par exemple, pour faire face à la pandémie il y a eu une augmentation de 84 lits de réanimation en Seine-Saint-Denis, quoi de plus normal ? Mais que penser de l’existence d’un projet de passer de 1049 lits à 744 dans le futur Hôpital du Nord parisien ? Il s’agit tout simplement d’un abandon de 300 lits qui ne peut m’empêcher de penser que le jour d’après s’annonce pire que le jour d’avant, avec l’accroissement de l’aveuglement du productivisme qui, dans sa logique, n’a que faire de l’expérience douloureuse du Corvidé-19. Cultivez-moi pour que je comprenne.

Par ailleurs, le Professeur Jérôme Salomon, Directeur de la Santé (non élu, nommé seulement) vient d’être montré du doigt par la commission d’enquête du Sénat sur le Covid-19 qui le charge clairement car, bien qu’alerté en 2018, précise-t-elle, il a choisi de ne pas reconstituer les stocks de masques, sans en informer la ministre en exercice Agnès Buzyn.

Il a aussi fait « modifier a posteriori les conclusions d’un rapport d’expert » qui aurait contredit sa décision. Comment résister à pareille accusation, si elle est fondée, et pourquoi ne pas démissionner si l’honneur est encore une valeur qui fait l’homme politique ? Mais rien de cet ordre-là ne vient ; au contraire, Jérôme Salomon n’a jamais autant parlé dans les radios, les télés, comme pour masquer la petite musique critique de son autoritarisme. Serait-il devenu intouchable ?

 

En tout cas, il ose tout, soutenu sans doute, mais il ose tout comme un Calife adjoint, jusqu’à nous imposer le nombre de convives autour de la table de Noël, avec le port du masque entre les plats, avant peut-être, de nous imposer le menu et de nous conseiller vivement le catalogue homologué des cadeaux conformes aux consignes des scientifiques sans lumière et des politiques sans âme qui ont toujours à notre disposition un mode d’emploi de la vie, sans la vie.

Vous voyez Monsieur le Président jusqu’où l’absence de transparence peut conduire un citoyen ordinaire soucieux de vérité que vous pourrez qualifier de complotiste, en vain, car désormais ce genre d’insulte lancée à tors à travers, est vidée de son contenu. Je n’attends que des arguments en mesure de me convaincre et je me cultive pour ne pas me soumettre à l’opinion du premier pouvoir venu.

En attendant, je ne sais plus quoi d’ailleurs, sans doute un peu plus de sincérité et de fraternité, le bal masqué continu sans orchestre, la musique est interdite, sans comédiens ni comédiennes, les théâtres sont fermés, sans tous ces gens de Culture qui sont si nécessaires à la santé du corps et de l’esprit, contrairement au Gouvernement qui considère durablement que les secteurs de la culture ne peuvent pas rouvrir dans l’immédiat car ils toucheraient à des libertés moins « prioritaires » que les commerces et les transports en soulignant, j’enrage, le caractère « substituable » de la Culture.

Alors Monsieur le Président, toujours contre le commentaire de ceux, nombreux, qui ne partagent pas votre choix et qui estiment que la Culture nous aide à contextualiser, globaliser, anticiper et pour lesquels l’aveuglement de certains esprits, parmi les agents du productivisme par exemple, tient beaucoup à leur défaut de Culture ? Savez-vous que la Culture donne les aliments nécessaires à la santé de la pensée critique, celle dont les commentaires vous gênent tant ? Savez-vous que la culture rend humble et enfante les questions à répétition ? Savez-vous que la Culture est le rempart majeur contre le vide social qui conduit au repli, à l’isolement, à la destruction physique et mentale ? Savez-vous par conséquent que la Culture est un des éléments majeurs du ciment social d’un peuple ?

Je ne veux pas rejoindre le camp des hommes et des femmes sans gravité, je veux avoir encore et toujours le poids d’un être déraisonnable qui commente sans réserve, avec sincérité ; je ne veux pas être en manque de Culture. Que chacun en fasse de même pour que vive la confrontation car c’est ce que réclame la quête de la vérité.

Dans le cas des salles de cinéma en particulier beaucoup de gérants ont saisi le Conseil d’État au nom d’une certaine injustice qui en faisait des activateurs de foyers de contamination. Pourquoi des supermarchés superfréquentés, pourquoi la libre ouverture des magasins de farces et attrapes, pourquoi des transports en commun au comble de la surcharge et pourquoi autoriser les sorties scolaires dans les piscines ou dans les gymnases, en oubliant celles des salles de cinéma où lors du premier déconfinement les conditions de sécurité furent parfaitement respectées ?

Pourquoi, pourquoi, pourquoi ? La réponse du Conseil d’État a été négative au nom d’une situation particulièrement défavorable ne permettant pas la prise en charge hospitalières des malades de la Covid-19 et des autres affections. Pourquoi pas, mais pourquoi à cause les lieux de Culture seulement ? Il n’en demeure pas moins qu’il s’agit là d’une atteinte sélective aux libertés, d’expression, de création, de découverte des œuvres et celle d’entreprendre.

Il faudra m’expliquer clairement, encore un doute, pourquoi Madrid fait figure d’exception puisque depuis juillet tout est ouvert, théâtre, opéra, cinéma, concert, même lorsque la deuxième vague a frappé fort : pas de hiérarchie entre le culturel et le cultuel. Plus précisément, durant cette période aucun foyer épidémique n’a été désigné sur le territoire espagnol de la Culture.

Au fond Monsieur le Président, comme pourrait vous le demander Edgar Morin, quel démon vous habite, quel est le moteur de votre politique ? Et quelle idée avez-vous de la Culture qui, dans la hiérarchie du Gouvernement, vient en fin de liste, pas du tout nécessaire.

Personnellement, je fais partie de ceux qui pensent que la Culture est inachevée, car toujours en mouvement ; qu’elle est l’ennemie de la certitude jusqu’à exister le plus souvent dans le cumul et non dans la substitution. Alors, si j’essaie de me cultiver, c’est parce que je suis curieux des changements dans l’ordre de la connaissance et soucieux de l’identité des mille détails qui font la vie quotidienne. C’est pourquoi j’aime les discussions, les échanges qui m’offrent souvent de vivre du souffle des autres.

Si j’essaie de me cultiver, c’est pour vivre une large ouverture sur le monde dans tous ses aspects dont le sport n’est pas la moindre de mes préoccupations. C’est sans doute cela être cultivé, ne jamais s’arrêter pour ne pas rester enfermé dans sa spécialisation ni dans une somme relative de connaissances qui fait le dogme et l’arrogance, mais toujours se poser des questions sans craindre les critiques, ni les accusations qui font frémir tout en s’épuisant dans la répétition à tout va, telles que complotiste, laïcard et j’en passe que vous reconnaîtrez vous-même.

Enfin, je me cultive en n’oubliant pas d’où je viens, ni de ceux qui m’ont permis d’être là et donné les moyens d’être curieux, sceptique, tout en appréciant les mystères de la nature, du goût retrouvé de la terre soignée, l’odeur de la terre mouillée, ce pétrichor qui me met toujours au meilleur de moi-même. Me cultiver c’est donc aussi de retrouver le silence, l’odeur d’une fleur, la fraîcheur d’une herbe, le son d’une mousse.

Mes grands-parents, mes parents, m’ont appris à cultiver tout cela, en me laissant souvent errer seul au cœur de la forêt de mon enfance qui bouge encore en moi. Toutes ces choses nécessaires vécues en direct sont mes démons aux côtés de ceux rapportés par d’autres vivants dans leurs livres, leurs films, leurs pièces de théâtre, qui me hantent comme sommeille un volcan et me laissent rarement seul. Méfions-nous que la Culture ne vienne à manquer !

Guy Chapouillié

URL de cet article 36807

 

Partager cet article

Repost0
2 janvier 2021 6 02 /01 /janvier /2021 01:45

Hergé, le père de Tintin se raconte

Hors série des Cahiers de la BD, Paris : 2020. 

 S’il y a un créateur qui a conçu un personnage qui ne lui ressemblait vraiment pas, c’est bien Hergé. Tintin, c’est non seulement une version supérieure de lui-même, mais aussi une projection fantasmée et idéalisée : « Tintin est certainement né de mon désir inconscient d’être parfait, d’être un héros », disait le créateur.

Heureusement pour nous les enfants de 7 à 77 ans, celui qui fut sa vie durant un être dépressif, bourré de contradictions, a créé un personnage lisse, plein d’allant, sans réels problèmes, avec un visage qui n’en était pas un (son visage est un masque disait Hergé), sans aucune appétence pour l’alcool, sans sexualité alors que celle de son créateur dut enchanter les psys qu’il consulta.

Les relations d’Hergé avec les femmes furent placées – nous rappellent les auteurs de cet ouvrage – sous le double signe de l’infantilisme, l’impossibilité de comprendre son rapport profond à sa mère, et du mythe de la petite fille. Et nous devons toujours garder en mémoire que le père d’Hergé était le fruit d’une union illégitime entre une servante et un comte chez les parents duquel travaillait la domestique. Certains évoquèrent même un géniteur dans la famille royale.

Contrairement à Tintin sans cesse en mouvement, Hergé ne quitta guère Bruxelles, ce qui ne l’empêcha pas d’imaginer et de recréer le monde comme peu de dessinateurs surent le faire. Un peu comme Blaise Cendrars qui affirmait que l’important n’était pas qu’il se fût rendu dans les pays de ses reportages mais que nous ayons cru, en le lisant, qu’il y était allé…

Après son service militaire en 1927, son retour à Bruxelles fut marqué par sa rencontre avec l’abbé Wallez, son père d’adoption, la « rencontre de sa vie », selon ses dires. Un curé nationaliste, catholique, conservateur, réactionnaire et qui adhéra au nazisme en 1940. Il rencontra le Duce et l’admira éperdument. Il fut l’éminence noire de Léon Degrelle, négationniste après la guerre et nazi jusqu’à sa mort sous le chaud soleil de Malaga.

Wallez rêva d’une Belgique qui se serait unie à la Rhénanie pour donner naissance à un État autoritaire au nord de l’Europe. Au début de sa carrière, Hergé voulut envoyer Tintin en Amérique, mais l’abbé lui imposa la destination africaine pour faire l’apologie de la colonisation belge. L’abbé n’aimait pas les États-Unis réputés protestants, où la société était infectée par l’argent du capitalisme « judéo-américain ».

De ce catholicisme, il ne restera rien. Dieu est absent des albums de Tintin, tout comme, à de rares exceptions près, la lumière du soleil (cherchez les ombres, il n’y en a guère).

En tant que créateur, Hergé ne venait bien sûr pas de nulle part. Ses influences furent Alain Saint-Ogan (Zig et Puce), son ami le sculpteur Tchang Tchong-jen, Benjamin Rabier (Gédéon, “ La Vache qui rit ”), Charlie Chaplin, Jerome K. Jerome, George McManus (La famille Illico), l’illustrateur René Vincent.

Bien que de droite toute sa vie, Hergé ne fut pas monolithique. Sous l’influence de son ami Tchang, il soutiendra la Chine contre le Japon, futur puissance due l’Axe. Il saura prendre le parti d’étudiants républicains espagnols lors d’une manifestation à Genève. Ses héros Quick et Flupke (pour lesquels Hergé eut toujours un petit faible) sauront défier l’autorité et se moquer des éditions Rex dirigées par Léon Degrelle.

Tintin prendra la défense de Zorrino dans Le Temple du soleil et des romanichels dans Les Bijoux de la Castafiore. Ces romanichels qui lui tireront une des très rares larmes de sa saga. Mais au début de la guerre, Hergé se rangera du côté de ceux qui voulaient être « embochés », faire vivre la BD car la collaboration était un moindre mal. Après la guerre, Hergé sera quelque temps interdit de publication avant que son dossier soit classé sans suite par la Justice.

Enfant, Hergé fut très probablement violenté sexuellement par son oncle maternel. Dans les albums, on remarque une hantise du corps poilu : le savant délirant dans Le Manitoba ne répond plus, le premier Haddock à la barbe folle, le singe Ranko, le yéti. Sans parler de cette scène extraordinaire – rêvée – de viol (Le Crabe aux pinces d’or, p. 34) où un Haddock hirsute, aux dents terrifiantes, viole Tintin avec un tire-bouchon.

La mère d’Hergé meurt aliénée en 1946. Jusqu’en 1959, alors qu’il est en pleine gloire, il va vivre une longue période dépressive, interrompant, par exemple, la saga lunaire pendant un an.

Les retrouvailles avec Tchang, cinquante ans plus tard seront décevantes. Sculpteur, Tchang est toujours dans l’académisme alors qu’Hergé a abandonné le réalisme pour se tourner vers le non-figuratif. Il soutient le Tibet quand son ami lui explique que cette province est chinoise depuis 2 000 ans.

Á l’École de recherche graphique, Tchang montre ses œuvres. Hergé, atteint d’une leucémie, n’est pas là. Tchang fait admirer ses talents de calligraphe et se fend d’une délicieuse pirouette. Il lit ce que son pinceau a tracé : « Travail donne Travail et produit de la Patience. Patience donne Patience et produit de la Force. » Les spectateurs méditent ce proverbe chinois, jusqu’à ce que Tchang les surprenne par un : « C’est une pensée de Rodin. »

Devrais-je le cacher plus longtemps ? Je considère Hergé comme l’un des quatre ou cinq grands génies créatifs du XXe siècle, au niveau de Charlie Chaplin ou Picasso.

URL de cet article 36804

Partager cet article

Repost0
13 octobre 2018 6 13 /10 /octobre /2018 23:20

 

Les militants gauchistes des années 70 étaient, pour la plupart, il faut bien le dire, très sérieux et dogmatiques, et leurs discours plombés d'idéologie marxiste tirée tout droit du XIXème siècle, ont souvent été un frein.

Ils étaient finalement assez conservateurs et puritains et n'avaient pas bien compris le vent nouveau qui soufflait sur la jeunesse en ces années-là. Leur seul but était de "faire la révolution" pour mettre en place une "dictature du prolétariat", dont on peut facilement imaginer à quoi elle aurait ressemblé s'ils avaient réussi ! Beaucoup d'entre eux avaient les cheveux courts (cf. le look Krivine de l'époque), pour pouvoir se mélanger aux ouvriers et répandre la bonne parole, écoutaient du classique plutôt que du rock, "musique décadente américaine", et ne fumaient pas de joints ("c'est pas bon pour la révolution, camarade"). (voir mon Mai 68).

Un reportage audio sur Mai 68 réalisé en 2006 par Marie Kergoët, étudiante en journalisme, avec Bernard Bacos, Jean-Pierre Le Goff, Martine Storti

TIGRE EN PAPIER

La lecture de "Tigre en Papier" d'Olivier Rolin m'a confirmé beaucoup de choses que je pressentais à propos des mouvements gauchistes des années 70 : c'étaient de véritables sectes. Rolin nous raconte celui dont il faisait partie, le groupe maoïste de la "Gauche Prolétarienne", mais les mêmes caractéristiques se retrouvaient chez les autres mouvements, trotskystes par exemple.

Au fil des pages, on découvre que les militants se surveillaient les uns les autres et dès que l'un d'entre eux faisait un petit écart par rapport à la ligne dictée par le "Grand Timonier" (Mao), il devenait immédiatement "suspect de déviationisme contre-révolutionnaire ou petit bourgeois". Un des exemples les plus hallucinants est le passage où Treize, le copain de Martin (Olivier Rolin) se permet une petite escapade amoureuse au bord de la mer, même pas sur la Côte d'Azur, mais en baie de Somme, avec l'avocate du groupe dont ils étaient tous plus ou moins secrètement amoureux.

Quand les camarades apprennent ça, les fautifs sont convoqués dare-dare à Paris, où ils ont droit à un procès politique dans la plus pure tradition stalinienne, et ils doivent faire leur "autocritique", le verdict leur imposant la séparation ! D'ailleurs, la plupart des militants gauchistes était terrorisée par le sexe et détestait la beauté, qu'ils considéraient comme "satanique" :" Cette méfiance vis-à-vis de la beauté, prélude à la haine de la beauté, était une espèce de lèpre morale dont nos esprits étaient infestés (...). Peut-être tout simplement parce qu'elle résiste, la beauté, à cette terrible volonté de nivellement que nous avions (...). Et la beauté de l'art, n'en parlons pas. Nous la détestions sans la connaître (...). Un militant ne pouvait avoir pour amie une fille sur qui les autres se retournaient. (p. 56). Quant aux vacances, ce n'était même pas la peine d'en parler, ce n'était qu'une tradition "petite bourgeoise" qu'il fallait éviter à tout prix !

Les sentiments dominants chez les militants étaient la mauvaise conscience, la culpabilité et la haine de soi, "un machin hérité du pire christianisme de mortification", dit Rolin. "Il fallait être en guerre contre le plus intime de soi" (p. 84)

C'était aussi le règne du mensonge, de la mauvaise foi et du terrorisme intellectuel : "L'idéologie, c'est la passion du faux témoignage" (p. 138). "C'est sans doute parce qu'on sentait qu'il y avait au fond de nous quelque chose comme un mensonge qu'on a été si déplorablement obsédés par la faute, des maniaques de la culpabilité. Et c'est aussi pour ça que l'instrument de notre punition a été l'ironie: on voulait trop avoir des destins, eh bien, on a eu des destins de Pieds Nickelés. La tragédie se répète en comédie, et à trop vouloir du drame on écope d'une farce. C'est l'ironie du sort" (p. 173) "

On entretenait le culte des prolétaires, qui avaient forcément raison, on se "purifiait de son éducation bourgeoise" à leur contact, même si on se posait quand même parfois quelques questions quand ils organisaient des "chasses au pédé" pour se défouler, faute de fachos.

Quand on lit tout cela, on ne peut que se dire :  "heureusement qu'ils n'ont pas pris le pouvoir !", car on imagine toutes les horreurs et les camps de rééducation dans le Larzac auxquels on aurait eu droit ! Mais le risque était faible, Rolin reconnaît que lui et ses camarades avaient le goût de l'échec, qu'ils avaient conscience d'être "du côté de ceux qui perdent", comme les héros qu'ils vénéraient, Che Guevara ou Rosa Luxemburg. "Faire la révolution, ce n'était pas tellement préparer la prise du pouvoir, c'était plutôt apprendre à mourir" (p. 13). "Ce qui t'exaltait aussi, penses-tu à présent, c'était la certitude inavouée de combattre pour une cause déjà perdue" (p. 28)

Trente ans après certains des membres de son groupe sont morts, tandis que d'autres sont devenus des "notables roses" friands d'honneurs officiels, et Gédéon, leur "Grand Leader", est rabbin dans une ville de province.

Voila pour la partie réquisitoire qu'Olivier Rolin tire de ses années militantes. Maintenant les aspects positifs car il ne renie pas tout : il parle vrai, sans complaisance, il apparaît éminemment sympathique à travers son bouquin, très touchant car sincère et modeste, et il fait preuve de recul et d'humour.

Le rythme est rapide, saccadé, assez rock'n'roll, il écrit comme il parle (à la fille de Treize, son copain, disparu depuis), il part dans des digressions, perd le fil puis le reprend. Il ne ménage pas ses critiques, il dit à plusieurs reprises qu'ils ont été cons de croire à toutes ces balivernes, mais en même temps il parle de cette époque et de ses personnages sans nostalgie mais avec une certaine affection et tendresse.

Il évoque la dimension héroïque du militantisme gauchiste, tous ces types qui rêvaient d'un grand destin comme celui des résistants sous l'occupation (le père de Rolin l'a été, puis il a été tué pendant la guerre d'Indochine, et une bonne partie du livre raconte l'émouvant parcours que son fils entreprend des années après sur ses traces au Vietnam), ou des grands révolutionnaires.

Il met en avant aussi l'internationalisme qu'il décrit comme une belle idée, ce qu'il est en effet. Dommage cependant que cet internationalisme ait été si haineux et dirigé contre toute une partie de la population, les "ennemis de classe".

Sur le même thème, lire aussi "Maos" de Morgan Sportès : "1975, les anciens maos commencent à se ranger des voitures, ils enterrent leurs idéaux et leurs cocktails Molotov, découvrent le plaisir, l'argent, le pouvoir: les chiens hurlants du marxisme-léninisme deviennent les chiens couchés du nouveau capitalisme - ou ses caniches de garde. Jérôme est de ceux-là : il a naguère posé des bombes, participé à des enlèvements, crié " vive la révolution culturelle prolétarienne chinoise ". Aujourd'hui il a un bon emploi dans l'édition, une fiancée cadre dynamique, un cabriolet, un appartement et il veut des enfants. Etre comme tout le monde enfin. N'être plus un héros: jouir! Mais son passé le rattrape. D'anciens camarades, purs et durs, veulent le réintégrer dans leur bande. Un certain " Obélix " lui remet un revolver enveloppé dans du papier kraft... Ainsi commence ce roman haletant. Jérôme s'affole. Mais qui sont ces ex-camarades qui le persécutent ? Sont-ils manipulés ? Par qui ? N'auraient-ils été tous, depuis toujours, que des marionnettes programmées par une main invisible ? Au fil de ce roman, construit comme un thriller détourné, nous sont révélées les coulisses de ces années de plomb: magouilles des services secrets, polices parallèles, terrorisme, provocations, ententes apparemment contre nature - Mao, Nixon, Brejnev. Les individus se métamorphosent en pantins d'un théâtre d'ombres."

Un autre témoignage édifiant, à propos de la destruction organisée du système éducatif français par les gauchistes, voici le bel aveu que fait l'ex-maoïste Claire Brière-Blanchet dans ses mémoires, "Voyage au bout de la révolution, de Pékin à Sochaux" :


Les maos ont perdu. Ils n'ont jamais fait la révolution ni conquis le pouvoir. Ils s'en félicitent aujourd'hui. Ils auraient été des totalitaires criminels. Mais les maos ont gagné. Dans l'un des chapitres les plus percutants du livre, Claire Brière-Blanchet nous rappelle la haine portée par ces « intellectuels » à l'enseignement de la culture «de classe», des «mandarins», de l'école «du capital», de la littérature «bourgeoise». Ils poussaient les jeunes à brûler les écoles. A contester le «savoir bourgeois». A refuser la domination des «héritiers». Et l'ancienne prof d'histoire, désolée de conclure en regardant le chemin parcouru par l'école depuis quarante ans : «Nous voulions détruire la culture européenne au nom d'une mythique culture populaire! Et je crois hélas que nous avons passablement réussi!»"

A la même époque, les hippies pratiquaient aussi l'internationalisme et la fraternité, mais sous une forme non-violente. Moi, j'étais plutôt de ce côté-là, "peace and love, flower power, make love not war, tune in, turn on, drop out". Le militantisme gauchiste ne m'a jamais tenté et quand je lis ces lignes je comprends d'autant mieux pourquoi.

Finalement, nous avions quelques points communs avec les gauchistes, le goût de l'aventure et de l'héroïsme, même s'il ne s'exprimait pas de la même façon, chez nous c'était à travers la route, la liberté sexuelle, le voyage intérieur avec les drogues, et toutes sortes d'expériences pour "réinventer la vie", même si elles étaient souvent foireuses et naïves.

Nous n'étions pas des blasés, pas des cyniques, pas des "on ne me la fait pas", mais plutôt des idéalistes, des utopiques, toutes ces choses qui se sont perdues aujourd'hui où règnent le second degré, le cynisme et le désabusement.

Pour ceux qui s'étonneraient de voir certains anciens militants devenus aujourd'hui des patrons de pub et des média, je rappelerai que le BA-BA de toute formation gauchiste était d'apprendre à infiltrer et manipuler les masses, et contrôler l'information, comme on peut souvent encore le constater.

Beaucoup de soixante-huitards se retrouvent en train de faire le grand écart en essayant de concilier ce qui leur reste de leurs dogmes avec les réalités actuelles. Et ils ont gardé cette rigidité idéologique et hyper-rationaliste de leurs années de militantisme, avec ce côté "tout est politique" que j'ai toujours trouvé exaspérant. (voir mon message sur Technikart.com et la discussion qui a suivi)

Néanmoins, certains étaient plus sympa et plus ouverts que d'autres, et leur énergie a bien contribué à faire bouger les choses. Parmi ceux-là :

Maurice NAJMAN avec son frère Charlie et l'A.M.R., le seul groupuscule politique qui tenait ses réunions à la Coupole !

LIBE : Serge JULY - Gilles MILLET - Patrick PIET - Jean-Paul GENE - Frédéric JOIGNOT (Frédo) alias RAKHAM LE ROUGE - Alain PACADIS - BAYON - Jean-Luc HENNIG - BAZOOKA -


En 73, j'étais au Pop Club de José Artur quand Maurice Clavel, le gauchiste chrétien, est venu annoncer la naissance du quotidien "Libération". La première époque fut assez militante, dans le ton de la presse gauchiste : occupations d'usines, etc.. Puis, vers 1976/77, avec l'influence du Punk, le ton changea et devint plus ouvert : les articles sulfureux et provocateurs de Pacadis ou du commando graphiste Bazooka

Les ALTERNATIFS, d'inspiration libertaire, qui ont monté des initiatives en dehors de tout dogmatisme : par exemple le squat de la rue des Caves à Sèvres. Sous leur forme plus violente, ils se sont appelés aussi les AUTONOMES, qui foutaient le bordel dans les manifs CGT.

La librairie PARALLELES, rue des Halles, depuis 1973, qui est devenue le lieu de référence pour toute la culture Underground et militante.

LES FEMINISTES : Antoinette FOUQUE , qui fonda le M.L.F., le groupe 'Psychanalyse et Politique' puis les Editions Des Femmes, rue de Seine, avec Delphine SEYRIG et Carole ROSSOPOULOS, pionnière de la vidéo militante. En 93, Antoinette Fouque a été élue députée européenne sur la liste de Tapie ! Et à la place de la librairie "Des Femmes", qui a déménagé rue Jacob, il y a un magasin Natalys ! De quoi faire avaler son macramé à une bonne féministe !

L'ENTREPOT, rue Francis de Pressencé dans le 14ème. Cet espace, ouvert par Frédéric Mitterand après l'Olympic, était composé de salles de cinéma et d'un restau, tenu par Leni, qui est vite devenu le rendez-vous des féministes.

La bande de Charlie ASSOULINE et DOM, rue d'Hauteville, avec le célèbre BIBERON.

Un des hauts lieux de la culture gauchiste fut la librairie Maspéro, rue St Séverin, où on pouvait trouver les oeuvres complètes des maîtres à penser de l'époque, Trotsky, Mao, etc.. La librairie dut fermer ses portes, en grande partie à cause de la fauche quasi institutionnelle. (mais ce n'était que l'application à la lettre de la célèbre formule "la propriété c'est le vol" !

VIVE LA FETE ! Vers les années 73-74, conscients que leur austérité et leur puritanisme n'étaient pas en phase avec les aspirations de la jeunesse, les diverses organisations gauchistes se mirent à organiser des "fêtes". Parmi elles, je mentionnerais celles de Lutte Ouvrière et de "Rouge".

Je me souviens avoir été à l'une de ces dernières avec François et Dorian, à la Porte de la Villette, pour voir notre groupe préféré Dr Feelgood, qui s'est envoyé 1 gramme de coke à 4 avant de monter sur scène ! Dorian, complètement bourré, s'est fait remarquer en provoquant les gauchistes présents et en les menaçant avec sa ceinture ! Heureusement qu'ils sont restés cools et que tout s'est terminé dans le calme.

Pour en savoir plus sur l'histoire du mouvement gauchiste, lire les deux tomes de Hervé Hamon et Patrick Rotman , Génération, Les années de rêve et Les années de poudre
Gourgas, une communauté gauchiste

Partager cet article

Repost0
22 septembre 2018 6 22 /09 /septembre /2018 23:20

En ces temps de cinquantenaire paradoxal (furtif et clinquant, cinglant et obséquieux, on ne sait plus à qui se fier....)  de mai 68 , l'ouvrage d' E. Jouve Avignon 1968 et le Living Theatre offre une occasion de questionner la "mémoire évanouie quant aux événements de juillet 1968 eux-mêmes" ; juillet 68 c'est-à-dire la XXII° édition du Festival d'Avignon, prise évidemment dans les remous des journées de mai et du mouvement social qui semble refluer, laissant un espace estival propice à la confrontation.

Comment l'invitation faite par Jean Vilar à une troupe de théâtre new-yorkaise, expérimentale et avant-gardiste a-t-elle fait de cette édition qui avait de peu échappé à l'annulation, une arène sociale et culturelle, une concentration des enjeux de pouvoir, de transgression, de renouvellement des conditions de production et de réception du théâtre , bref un point nodal et méconnu ?


Judicieusement organisé en deux temps ( "Mémoire[s]" et "Héritages[s]"), présentant les souvenirs des participants à ce XXII° Festival d'Avignon (comédiens, étudiants, membres fondateurs...) puis les "fictionnalisations contemporaines de juillet 68" ( où on retrouve les noms d'O.Py, Ph. Caubère, S. Nordey...), le livre s'ouvre sur un chapitre intitulé "Histoire[s]" balisant de façon claire , complète et d'une lecture aisée les étapes du projet de l'auteur, les dates-clés de l'élaboration du XXII° festival dans ses incertitudes et son avancée chaotique, les noms et le parcours des protagonistes évoqués.

"Béjart, Vilar, Salazar" ou l'histoire d'un malentendu (1) : 
Avignon 2018 incarne le dialogue sinon impossible, en tout cas difficile d'une troupe qui peut être perçue comme une aristocratie avant-gardiste avec une "vieille avant-garde", incarnée par Jean Vilar, portant l'idéal de la culture populaire et liée au PCF. Improviser, jouer dans la rue, ne pas faire payer les spectateurs, squatter un lycée avignonnais, choquer le bourgeois et partir avec la caisse : le potentiel de scandale du Living Theatre est sa marque de fabrique.

Malgré son désir d'ouverture et d'écoute, Jean Vilar est débordé par ces revendications dont l'enjeu lui échappe en partie, et le slogan qui l'assimile, ainsi que Béjart au dictateur portugais signe l'irrémédiable rupture. Paradise Now VS Le Sacre du Printemps, c'est l'affiche de ce mois de juillet 68...

"Enfin, pourquoi ils réclament des pois chiches ?" ou l'histoire d'un malentendu (2) :
Plus problématique peut-être, révélé par cette anecdote navrante et hilarante racontée par Melly Puaux, secrétaire pour le festival en 1968 :"Le spectacle a été mal reçu, les Avignonnais ne comprenaient pas Paradise Now Je me souviens qu'au début du spectacle, ils réclamaient que le haschich soit en vente libre, le machiniste avignonnais des Carmes qui ne comprenait pas l'anglais et avait du mal avec leur accent américain nous dit : "Enfin pourquoi ils réclament des pois chiches, qu'on leur donne des pois chiches !" ". Rupture de classe, rupture de génération, clivage social et esthétique, sous le récit cocasse, s'ouvre le gouffre des rapports de l'art et de la politique ; le financement et l'encadrement institutionnels de l'art, eux-mêmes devenus enjeux artistiques, bref le -très vieux déjà- pas de deux du Prince et de l'Artiste (ici élargi à la communauté du peuple, du moins aime-t-on à le croire.).

"C'est en colère que nous avons commencé" , slogan en forme d'art poétique du Living, ouvre l' ambition de faire du théâtre le "commencement d'un futur démocratique inédit" ; à peine formulé, déja invalidé ? C'est à cette question que répondent de manière nuancée et chorale les propos des "héritiers", prenant acte des excès et des incohérences  mais rendant hommage – sans obséquiosité – à la richesse de la proposition artistique.

Ainsi Philippe Caubère, citant son personnage de Ferdinand dans le spectacle qu'il a consacré à Avignon 68 : "Je dois tout au Living, ainsi qu'à Jean Vilar", ajoutant cependant que le travail d'improvisation et le rôle du corps prôné par le Living l'ont "libéré de l'angoisse du texte". Les photographies complétant les textes témoignent en dernier ressort, de cette puissance libertaire qui survit au temps et aux polémiques.

 

Anna

Titre : Avignon 1968 et le Living Theatre, mémoires d'une révolution.

Partager cet article

Repost0
17 septembre 2018 1 17 /09 /septembre /2018 23:20

S’il fallait retenir un titre du regretté Rachid Taha et du groupe carte de séjour, ce serait certainement celui-là. A coté du non moins célèbre Banlieue de Karim Kacel, cette chanson est aussi devenue le cri de ralliement de ces milliers d’enfants d’immigrés qui ont vécu et grandi dans ces zones lugubres, cet univers presque carcéral qu’il faudra porter en bandoulière et surtout vite quitter.

Mais à coté, il faudra aussi subir les humeurs noires des politiques et des hommes des médias qui banaliseront les concepts les plus abjects et réussiront à les faire partager par le plus grand nombre.

Une chanson culte, prémonitoire et ce bien avant que Rachid Taha n’interprète le sublime Ya Raiah du regretté cheikh Dahmane El Harrachi que l’enfant de l’Algérie profonde rendit mondialement célèbre.

Chantée par Rachid Taha avec sa voix enrayée comme celle de Janis Joplin, Ya Raiah incarnera subitement un hymne au retour comme substitut à l’exclusion mais surtout comme ultime refuge dans la dignité.

Un pèlerinage au pays de son enfance. Et ne dit-on pas que l’on est toujours de ce pays là. Politiquement engagé, Rachid Taha aura aussi été un artiste extrêmement généreux qui a profondément aimé son pays d’origine. Qu’il repose en paix.

Salim METREF

Partager cet article

Repost0
20 mai 2017 6 20 /05 /mai /2017 23:20

 

Caricatures sort en 1972, et établit les fondations du style Ange, style que le groupe se contentera d'affiner par la suite. Car tous les ingrédients du breuvage Ange sont déjà là. La musique fait écho au romantisme clair-obscur qui enrichit la pop de l'autre côté de la Manche. Les arabesques symphoniques qui enveloppent Caricatures doivent beaucoup aux Moody Blues d'In Search Of The Lost Chord ou au Procol Harum de A Salty Dog. on y retrouve cette même volonté d'élargir le vocabulaire rock en s'extirpant plus on moins de la sacro-sainte structure couplet/refrain et en multipliant les thèmes et les ambiances au sein d'une même composition.

A l'instar des devanciers anglais sus cités, Ange se contentera d'ébaucher cette démarche. Ce n'est ni un reproche, ni un regret. En 1972, le rock progressif a atteint un certain seuil de maturité, c'est l'année de Close To The Edge et de Foxtrot. Ange, conscient de ses capacités techniques limitées ne cherchera jamais à rivaliser avec Yes ou Genesis en matière de débauche instrumentale. Sans préméditation, les Belfortains ont eu l'intelligence et la témérité de créer leur propre style de rock progressif, en combinant la tradition française de la chanson à textes aves des racines anglo-saxonnes authentiquement progressives.

Dans Caricatures, l'adéquation est encore fragile, parfois mal équilibrée (la très belle pièce instrumentale «Biafra 80» côtoie le morceau-fleuve «Caricatures» qui, s'il consacre, dans ses dernières minutes, Christian Décamps en digne émule de Jacques Brel, s'avère toutefois bien inégal du point de vue de l'inspiration mélodique et de l'exécution instrumentale). Encore trop ancrés dans une critique acerbe et désabusée du réel, les textes pèchent ici et là, encombrés de quelques travers démonstratifs.

Deux titres indiquent la voix à suivre. «Dignité», où Christian laisse la plume à son ami Roger Lombardot, est la première véritable fresque progressive d'Ange et deviendra un cheval de bataille scénique.

Le Moyen-Age, amené à devenir une source d'inspiration de tout premier ordre, s'esquisse ici. Jean-Michel Brézovar compose et interprète les délicats arpèges du «Soir Du Diable». Ce morceau, s'inscrivant dans la lignée du King Crimson de «Cadence and Cascade», symbolise Ange aux yeux de bien des fans, puisque c'est sur ce dernier que Christian a recours à ses marionnettes représentant le bien et le mal.

Quant à Francis, il est responsable de l'élément le plus caractéristique du son Ange, avec ses nappes d'orgue brumeuses et emphatiques, résolument singulières. Francis n'avait pas les moyens de se payer un mellotron, il opta donc pour un Viscount.

Explications de l'intéressé : «J'avais amené une réverb de récupération qui venait d'un Hammond, et le technicien l'a monté. Alors là, l'horreur ! La réverb se met à siffler, a saturer [...]. Alors on a trouvé une solution, mettre cette réverb' dans une boîte dans de la mousse [...]. On l'a collé à dix mètres, très très loin avec un câble dans un endroit tranquille, les loges, pour éviter de shooter dedans. De là est né le son Ange, en vérité ! Après plein de groupes ont essayé de trouver le truc mais sans y arriver car le procédé était tellement con, c'était tout simple, du bricolage quoi !».

Vendu à 15.000 exemplaires en l'espace de quelques semaines, Caricatures permet à Ange d'assurer la première partie du «Johnny Hallyday Circus», tournée d'été sous chapiteau sensée remonter la cote de popularité de notre Johnny national, alors en déclin (!). Auréolée d'un succès toujours plus grandissant, cette guest-appearance permettra à Ange de peaufiner l'aspect visuel de ses concerts (on parle déjà de rock-théâtre) et d'asseoir plus encore sa réputation de machine à rêves populaire. En septembre 1972, dans le cadre du 'Franche-Comté Pop Festival' de Montbéliard, Ange partage l'affiche avec Genesis, Caravan, Matching Mole et Nektar.

Jean-Claude Pognant organise ensuite une tournée outre-Manche et Ange investit les universités anglaises, réceptives au charme latin de ce progressif venu d'ailleurs. Lors de leur deuxième passage à Manchester, les Belfortains réuniront 2500 personnes fascinées par Brézovar l'alchimiste et Christian Décamps, l'orateur possédé.

Ce dernier évoque l'ouverture d'esprit des Anglais d'alors : «Les Anglais ne sont pas chauvins [ndlr : sic !]. C'était à l'époque la descente de Gary Glitter. Marc Bolan commençait à changer d'orientation. Les Anglais se cherchaient et les groupes dits du continent perçaient, notamment Focus [...]. Il y avait aussi Tangerine Dream, la musique planante, Klaus Schulze, et Ange qui intéressait par son côté médiéval [...]. Le jeune Anglais allait aussi bien voir Tom Jones avec ses parents que John Mayall, Status Quo ou Genesis. Pas de sectarisme comme en France !».

De retour au pays des sectaires, c'est l'enregistrement du Cimetière Des Arlequins, album charnière où Ange, jusqu'ici groupe très prometteur, devient le premier combo rock français. Nous sommes en 1973.

Le constat amer d'une réalité hypocrite et désabusée (la reprise de «Ces Gens-Là») est le sésame vers d'autres mondes où la volonté de métamorphose l'emporte toujours sur le désir de mort. Plaisir indicible des sens, la femme est perfection esthétique («L'Espionne Lesbienne»).

L'impressionnisme est instrument de torture («La Route Aux Cyprès»). Les siècles chrétiens se confondent à la terre du milieu («Bivouac», «Aujourd'hui C'est La Fête Chez l'Apprenti Sorcier»). Angoisse existentielle («De temps en temps, d'où vient le sentiment de crever d'infortune / De temps en temps, d'où vient le filament qui lie chaque lacune»). Même le chemin vers la mort est peuplé de créatures hybrides, à la fois maléfiques et loufoques («Le Cimetière Des Arlequins»).

La dimension littéraire s'affine, la musique n'est pas en reste et donne corps aux visions fantasmagoriques de Christian Décamps, les transformant en images fortes. Toile de fond de cette veillée funéraire, les orgues de Francis sont en rut perpétuel. Le jeu de batterie de Gérard Jelsch n'est pas sans évoquer la précision et la force de Mike Giles (King Crimson).

L'économie de moyens des lignes de basse de Daniel Haas est d'une redoutable efficacité. Dans «Ces Gens-Là», Frida, la voix du salut de maître Brel, est substituée à un solo de guitare extatique qui a conservé, vingt-sept ans plus tard, tout son pouvoir émotionnel. Brel lui-même saluera ce tour de force.

Audacieuse et follement inspirée, la musique d'Ange est tout de même un peu diminuée par quelques transitions malhabiles et, surtout, par une production déficiente quoiqu'agréablement surannée (au gré de la nostalgie de chacun). Jean-Michel Brézovar s'en explique : «Quand tu arrivais en studio, l'ingénieur avait toujours le même son dans la tête. C'était l'époque où on ne produisait que de la variété : Nana Mouskouri, Georgette Lemaire, etc. [...]. Toi, tu arrivais avec tes amplis Marshall et tu poussais le volume à fond. Normal, parce que c'est ce que tu faisais sur scène.

Mais l'ingénieur du son, il était à côté de la plaque ! Il te disait qu'il fallait baisser parce que ses aiguilles étaient dans le rouge ! En fait, il n'arrivait pas à comprendre que la base de ton son provenait de cette puissance [...]. Voilà pourquoi les premiers disques n'avaient pas cette dynamique qu'on pouvait retrouver sur scène».

Le Cimetière Des Arlequins sera toutefois le premier disque d'or d'Ange, élargissant considérablement son audience. Des multiples concerts que le groupe donnera pour le promouvoir, le plus impressionnant (et le plus mémorable) sera celui du festival de Reading de 1973 où 30.000 Anglais (dont un Steve Hogarth encore adolescent) lui réserveront une ovation à tout rompre. Gérard Jelsch aura même droit à un article très flatteur dans le Melody Maker.

La presse française ne relatera jamais cette exploit, sans doute parce que les décideurs parisiens jalousaient cette 'bande de ploucs' qui avaient réussi à enfiévrer la patrie du progressif sans le soutien de l'oligarchie du rock made in France. Et pourtant, à l'instar de Magma, Ange triomphera de chacune de ses tournées au sein de la perfide Albion. Hélas, mille fois hélas, leur management ne leur permettra jamais de vraiment percer le marché anglais. La ténacité de Jean-Claude Pognant est moins à mettre en cause que le travail promotionnel indigent de Phonogram.

En janvier 1974, 6000 personnes vibrent à l'unison au Palais des Sports de Paris. En avril 1974, Ange publie son album le plus célèbre, Au-Delà Du Délire.

Il est essentiel de ne jamais occulter l'importance que revêt cet album, dans la discographie du groupe bien sûr, dans l'histoire du rock français évidemment, mais surtout, puisque nous sommes dans Big Bang, dans la galaxie progressive. Gardons-nous bien de le consacrer meilleur album de rock progressif français de tous les temps, ce genre de sentence ne reposant jamais sur des critères objectifs fiables.

Dans ce cas précis, la diversité stylistique qui a caractérisé l'éclosion d'une nouvelle scène progressive française ces dernières années nous l'interdit catégoriquement. Plus que n'importe quel autre album d'Ange, Au-Delà du Délire définit le vocable (et les poncifs ?) d'un indéniable sous-genre du rock progressif.

Si celui-ci a longtemps sclérosé l'ambition de beaucoup de formations hexagonales (Mona Lisa, Pentacle, Naos, Versailles, Eclat de Vers...), il fut aussi le terreau fertile d'un authentique renouvellement du genre (le Galaad de Vae Victis et, plus récemment, le Caféine de Nouveaux Mondes). La chanson-prog à la française inventée par Ange (Alain Chiarazzo d'Eclat parlait de 'poésie-rock') est donc une inspiration première susceptible d'engendrer de belles et grandes œuvres si l'on fait fie du clonage et de ses obligatoires corollaires restrictifs (en terme d'ambition).

Une nouvelle preuve en somme que le rock progressif n'est jamais meilleur que lorsqu'il reste fidèle à son esprit originel, celui de la fusion des genres.

Cet esprit, Ange le respecte à la lettre en 1974 et atteint une quasi perfection dans l'adéquation chanson française à textes / rock symphonique anglais. A ce titre, il est intéressant de constater que le magazine américain Progression, dans le cadre d'un listing d'albums fondamentaux du courant progressif, a placé Au-Delà Du Délire aux côtés d'In The Court Of The Crimson King ou encore Ashes Are Burning de Renaissance.

Au-Delà Du Délire est un concept album. Voici le script original, co-écrit par Christian Décamps et Jean-Claude Pognant : «En 1358, Godevin des Alouettes, avec sa femme Céline et leurs deux enfants, Petit Pierre et Églantine. Godevin était vilain de son état et travaillait pour le compte du baron Henri de Valeran. Un jour, Godevin rencontre Isaac, un vieil alchimiste vivant dans la forêt. Godevin lui fit part de sa condition.

Isaac lui enseigna une partie de sa connaissance. Lorsque Godevin revint au hameau, il était décidé a devenir un homme libre. Il parla à ses compagnons et décida de fomenter une révolte. Celle-ci fut très vite réprimée par la noblesse. Le baron, intrigué par le nouveau comportement de Godevin, l'invita au château afin de le soudoyer. Refusant de livrer son secret, Godevin sera condamné a être brûlé en tant qu'hérétique.

Son corps est détruit par les flammes, mais son 'moi' spirituel rejoint le cosmos. Il y parfait sa connaissance en observant la désintégration complète de la race humaine et de ce qu'elle a construit; désintégration consécutive à la bêtise qui n'a cessé de grandir au cours des siècles. Godevin, durant toute cette période spirituelle a compris l'ensemble des choses et au 25ème siècle, il se réintègre sous sa forme humaine, sur une terre revenue a son origine. La végétation et les animaux sont là, comme au commencement des temps, mais il n'y a plus d'humains [...]. Godevin rencontrera une biche, qui peu a peu se transformera en femme, ayant les traits de Céline».

Ce conte, au parfum de science-fiction un brin caricaturale, est, malgré tout, le pendant littéraire idéal d'une collection de huit pièces musicales bouleversantes auxquelles Ange a insufflé tout son génie mélodique. Le frisson est constant, de l'introduction de «Godevin Le Vilain» où clavecin et violon se mêlent divinement, au tonitruant solo de guitare qui conclut l'album, en passant par les déclarations péremptoires de «Si j'étais Le Messie», où l'anticléricalisme primaire des débuts a fait place à une véritable réflexion, déclinée sur un mode poétique majeur.

Le ton se durcit, Ange privilégie les montées d'adrénaline («Les Longues Nuits d'Isaac», «La Bataille Du Sucre», «Fils De Lumière»). Brézovar révèle un doigté diabolique, enfin exploité à sa juste valeur («Exode», le morceau-titre).

Bref, tout concourt à faire d'Au-Delà Du Délire l'album référentiel d'Ange même si, nous le verrons plus loin, ce n'est pas son album progressif le plus réussi. Il s'y dégage cependant un parfum de magie qui embaume une vie de mélomane pour l'éternité. C'est avec ce deuxième disque d'or qu'Ange accédera à l'autel de la scène rock française, et ce jusqu'à la fin de l'ère progressive.

L'euphorie sera pourtant de courte durée puisqu'à l'occasion de la répétition générale de la tournée 'Bivouac 74', Christian se casse les talons lors d'un saut qui, s'il devait constituer un effet visuel particulièrement impressionnant, dénotait une certaine inconscience. Cet accident exacerbe des conflits sous-jacent entre les membres du groupe.

Jelsch quitte le navire et est remplacé par Guénolé Biger (qui sera plus tard le batteur des Négresses Vertes). Privé de concerts pendant quatre longs mois, Ange participe quand même à une soirée 'au profit d'Ange' à Belfort le 21 septembre 1974, avec Mona Lisa. L'ensemble des titres d'Au-Delà du Délire y est joué pour la première fois, avec Christian en chaise roulante.

Partager cet article

Repost0
13 mai 2017 6 13 /05 /mai /2017 23:20

Née des mouvements de radios libres de la fin des années 70, Radio Canut fête cette année ses 40 ans. L’occasion de se retrouver les 19 et 20 Mai prochains autour d’une bouffe partagée, d’un documentaire, d’une journée de radio hors les murs sur la place Guichard et d’une méga soirée concert pour clore les festivités en soutien à la caisse de solidarité.

Radio Canut est née à travers des collectifs de radios libres lyonnaises s’organisant pour diffuser des émissions en piratant les ondes hertziennes. La volonté de créer des outils relayant les luttes pousse des individu.e.s à se former à la radio, média facile d’accès et peu onéreux. Un combat voit le jour entre le pouvoir étatique et les structures contestataires soucieuses d’autonomie. Le premier désire préserver son monopole sur les ondes, instauré en 1959, renforcé jusqu’en 1978, et réprime toute personne et collectifs s’y opposant.

En 1981, la libération des ondes permet à Radio Canut de se voir attribuer une fréquence et de perdurer dans le temps. Contrairement à d’autres radios libres, le collectif a toujours refusé la professionnalisation, portant une parole militante, dans une radio non commerciale et sans chef.fe.

Les années ont passé, beaucoup d’émissions de styles variés ont été diffusées : émissions d’éxilé.e.s d’Amérique latine, d’Afrique et d’ailleurs, politiques, féministes, écolo, musicales (chanson française, punk, reggae, hip hop, métal, électro…), créations radiophoniques et bien d’autres encore. Du lundi au vendredi, les Canut Infos sont animés par des équipes différentes qui se relaient année après année pour proposer un autre regard sur l’actualité.

Récemment, face à l’augmentation des loyers dans le quartier et la volonté de protéger les activités de notre radio, on décide collectivement d’acheter le local dans lequel la radio est installée depuis des décennies, rue Sergent Blandan. Alors, grâce à un large soutien et une forte mobilisation, on a pu trouver l’argent nécessaire pour l’achat fin 2015. On en profite au passage pour remercier tout.e.s cell.eux qui nous ont soutenu.e.s.

L’automne dernier, une perquisition a eu lieu dans le local, au moment où les flics manifestent tous les soirs dans les rues de Lyon. Puis, à deux reprises, notre vitrine a été caillassée. Tout ça ne nous fait pas taire. On continue de laisser traîner nos micros dans les mouvements sociaux, à faire découvrir les musiques, les auteur.es qu’on entend moins ailleurs et les 20 et 21 mai prochains on organise en trombe un festival pour fêter 40 ans de radio libre, autonome, voulant prendre et donner la parole à celleux qui ne l’ont pas.

Alors, attention, attention, au programme :

  • Le mardi 16 Mai, de 20 h à 21h, un ancien animateur te raconte sur le 102.2 l’histoire de radio canut. L’émission avait été faite pour les 30 ans de la radio, l’animateur est interviewé par une camarade des radios libres.
  • Le vendredi 19 Mai à 20h, projection de Lorraine Coeur d’Acier, un documentaire sur 2 ans de radio libre en période de luttes sociales contre la fermeture des acieries en Lorraine, le tout suivi d’une bouffe à l’Atelier des Canulars, 91 rue Montesquieu, Lyon 7ème.
  • Et le samedi 20 Mai, tes anim’ préféré.e.s sont sur la place Guichard de 11h à 19h ! Viens les voir faire de la radio en direct, mix et discu politique ! Un programme de le journée sera diffusé sous peu...

Pour choper l’info : 40ans@radiocanut.org

Partager cet article

Repost0
14 avril 2017 5 14 /04 /avril /2017 23:20

Partager cet article

Repost0

Recherche

Créer un blog gratuit sur overblog.com - Contact - CGU -